Amour et orthodoxie aux monastères des Météores

Drôle de conte situé dans le cadre si particulier des monastères des Météores, dans lequel un moine grec et une nonne russe tombent amoureux l'un de l'autre. Le film travaille une ambiance onirique évidente, de par la nature purement géologique des lieux (perchés aux sommets de monolithes de grès) et à travers l'utilisation d'images animées rappelant d'anciennes gravures.


On est comme suspendu, perdu dans des rêves, perdu entre le ciel et la terre, perdu en pleine orthodoxie et ses codes qui contrastent avec toute notion de modernité. Pas d'électricité, seulement un système de poulie pour faire monter ou descendre des vivres et des gens tout en haut de l'édifice d'une côté (des femmes), et des escaliers interminables de l'autre (des hommes). En bas, loin de la religion, les moines rencontrent de temps en temps des paysans qui jouent de la flûte ou sacrifient des chèvres (un passage un peu trop forcé, dans sa forme, pour montrer le caractère brut de cet univers, mise à mort d'un animal mis en scène avec une caméra extrêmement mobile alors que le reste du film est presque uniquement en plans fixes). L'agneau de dieu sacrifié sur l'autel de l'amour : image très très explicite.


J'ai beaucoup apprécie le traitement de la passion, le recul pour illustrer ce conflit intérieur qui bouleverse ces deux religieux dont la foi est minée par le désir charnel. C'est anti-spectaculaire, très attaché à la description des petits gestes, alors que le cadre grandiose aurait pu laisser enfler un certain gigantisme. C'est par le mode de l'animation que les passions se déchaînent principalement (hormis une scène montrant le corps de la nonne et une autre qui voit le couple faire l'amour dans une grotte), avec le sol qui s'effondre pour laisser place à un tableau de l'enfer, avec l'homme face à un ours, avec les cheveux de la nonne qui rejoignent la chambre du moine pour les unir, ou avec le fil d'Ariane au sein d’un labyrinthe couplé à une crucifixion. Des moments suspendus.


Très original, dans la forme, dans le fond, dans la façon d'aborder l'attirance charnelle dans un contexte religieux. Dommage que le soulignement systématique enferme le film dans un carcan explicatif.

Morrinson
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Top films 2013, Avis bruts ébruités et Cinéphilie obsessionnelle — 2019

Créée

le 20 janv. 2019

Critique lue 260 fois

2 j'aime

Morrinson

Écrit par

Critique lue 260 fois

2

D'autres avis sur Metéora

Metéora
Jduvi
7

Ne nous soumets pas à la tentation

Deux pitons rocheux, chacun coiffé d'un monastère, l'un pour les hommes l'autre pour les femmes. Au milieu, un autre mont, bien moins haut, sur lequel est posé un unique arbre. L'image est belle...

le 2 juil. 2019

1 j'aime

Metéora
ffred
8

Critique de Metéora par ffred

La production cinématographique grecque ne doit pas être très importante ces temps-ci, la sortie de ce film est donc à noter (même si les fonds proviennent surtout d'Allemagne). Présenté en...

le 29 juil. 2013

1 j'aime

Metéora
YgorParizel
7

Critique de Metéora par Ygor Parizel

Une oeuvre contemplative, calme et envoûtante. Le site naturel ou le film se déroule est tout simplement époustouflant, beaucoup de plan ont une force picturale et sont construits comme des...

le 25 oct. 2015

Du même critique

Boyhood
Morrinson
5

Boyhood, chronique d'une désillusion

Ceci n'est pas vraiment une critique, mais je n'ai pas trouvé le bouton "Écrire la chronique d'une désillusion" sur SC. Une question me hante depuis que les lumières se sont rallumées. Comment...

le 20 juil. 2014

142 j'aime

54

Birdman
Morrinson
5

Batman, évidemment

"Birdman", le film sur cet acteur en pleine rédemption à Broadway, des années après la gloire du super-héros qu'il incarnait, n'est pas si mal. Il ose, il expérimente, il questionne, pas toujours...

le 10 janv. 2015

138 j'aime

21

Her
Morrinson
9

Her

Her est un film américain réalisé par Spike Jonze, sorti aux États-Unis en 2013 et prévu en France pour le 19 mars 2014. Plutôt que de définir cette œuvre comme une "comédie de science-fiction", je...

le 8 mars 2014

125 j'aime

11