Allez hop : pan ! un 21/20 bien mérité à cette œuvre qui, une fois de plus, démontre qu’on peut surmonter et même dépasser le handicap, à condition toutefois de le vouloir et de se voir autant que possible comme une personne ordinaire. Egalement à condition de le pouvoir, car ça dépend de tout un ensemble de choses, tels que le degré du handicap, le caractère, l'entourage, etc... Mais le plus souvent, quand on veut, on peut !
Sauf qu'ici Laura, jeune personne trisomique, est loin d’être une personne ordinaire. Pas plus que cette élève (Yasmina Berraoui, en 2014 à Casablanca) qui a sans le savoir donné naissance à cette fiction. Et pas plus que cette interprète, époustouflante en tous points. Je pense que beaucoup de monde va attribuer à cette dernière une mention particulière. Marie Dal Zotto, puisque c’est son nom, la mérite amplement. Mais elle n’est pas la seule à la mériter, parce que sans l’attention du staff technique (en particulier la direction d’acteurs) et des autres comédiens, elle n’y serait peut-être pas arrivée. Et j’insiste sur le « peut-être ».
Bien que s’inspirant de faits réels, "Mention particulière" n’en reste pas moins une fiction. Mais une fiction qui respire l’authenticité. Bien sûr, j’entends déjà dire qu’une trisomique passant son bac parait fort de café et éminemment ridicule. Mais quand on voit Marie jouer devant la caméra avec autant de facilité apparente et de vérité, pourquoi pas ? Pour avoir vu son interview dans le magazine télé "Sept à huit" du 5 novembre 2017, je peux vous assurer qu’elle n’est pas aussi idiote qu’elle en a l’air, et qu’en plus elle a un sacré sens de la répartie. Non mais franchement : elle est trop mignonne ! A travers cet interview, elle respire la joie de vivre. Le bonheur incarné. Et quelle détermination… Un naturel qui la rend indubitablement attachante.
Eh bien ce sont justement tous ces éléments que nous allons retrouver durant la 1ère partie : une jeune fille pas avantagée par les cruels mystères de la génétique, mais une jeune fille pleine de vie, douée de spontanéité et non dénuée de sens de l’humour. Les trisomiques sont connus aussi pour leur gentillesse et leur énorme tendresse. On retrouve ça aussi. Laura/Marie est un modèle de volonté, une volonté parfois trahie par le rictus de la détermination.
A côté d’elle, Bruno Salomone, Hélène de Fougerolles et Maïra Schmitt complètent le tableau familial. En plus de la performance de la lumineuse Marie Dal Zotto, le ton juste des dialogues nous fait entrer dans une vraie famille. D’autant plus que la réalisation est dynamique sans aucune connotation dramatique (ou peu), au rythme de cette famille qui vit à l’heure du baccalauréat, au grand dam de la petite sœur pourtant complice avec son aînée.
Ainsi, Christophe Campos nous fait partager la vie d’une vraie famille : une famille qui fait plus ou moins penser à "Une famille formidable" (évoquée), c’est-à-dire une famille qui s’unit, une famille qui s’engueule, une famille qui se déchire, une famille qui se reconstruit, et ainsi de suite… la vie, quoi !... avec ses joies, ses épreuves et ses peines.
Mais au-delà de ça, le sujet était délicat à traiter, mais il l’a été avec le plus grand sérieux. Je veux dire qu’il ne tombe jamais dans le pathos, piège pourtant facile dans lequel on peut tomber. De plus, il ne manque rien, tout du moins pas grand-chose (auquel cas je ne vois pas quoi) : le regard des gens, les moqueries, les difficultés liées à un système qui s’obstine à ne pas vraiment s’adapter (on a d’ailleurs envie de secouer Jonathan Lambert par le cou, avec les éternels « si ça ne tenait qu’à moi… » du proviseur qu’il incarne). Pour le reste, je vous laisse tirer les leçons qui s’imposent, afin de ne pas paraître trop moralisateur.
En attendant, la première partie est placée sous le signe de la joie et de la bonne humeur, un signe qui va souvent de pair avec l’espoir, souvent synonyme de bonheur. La seconde partie est plus marquée par la dramaturgie. Je vous laisse découvrir pourquoi, mais il est vrai que c’est inévitable car on ne peut plus logique. Ben oui, il n’est pas facile de bousculer les idées reçues. Après tout, le pays des Bisounours n’est qu’imaginaire ! Pas de quoi s’inquiéter, bien au contraire ! Cette seconde partie nous gratifie de quelques scènes poignantes, avec une Marie Dal Zotto de plus en plus ahurissante. Bruno Salomone est surprenant aussi, car il sort un jeu juste. Enfin il montre quelque chose d’intéressant : un vrai jeu. Et Hélène de Fougerolles lui donne bien la main, avec la participation active et un tantinet rebelle de Maïra Schmitt.
Question réalisation, c’est parfait. Enfin presque. Ben oui, le français de base est râleur : il faut toujours trouver à rechigner quelque part. Par exemple, on peut noter la répétition de la prise de vue aérienne du domicile familial, ou des scènes répétées sur cette personne âgée qui promène son chien (quoique c’est à se demander si ce n’est pas le chien qui promène son vieux). Et puis on se pose la question sur la nécessité de couper le téléfilm en deux épisodes : ça coupe le récit mais en même temps il faut garder en mémoire que nous sommes sur TF1, alors c’était cette césure ou la pub.
Sinon, tout le reste est parfait alors on pardonne volontiers ces petits écueils, somme toute pas bien graves. Le transport au pays des émotions est bien réel. Si réussi qu’on vit intensément les joies et les peines de cette famille. Les plus sensibles pourraient même y verser de leur petite larme. De très belles scènes (le parallèle entre le père parti courir pour se défouler et la détresse de sa fille est tout bonnement magnifique et trahit cette indéfectible complicité), une très belle photographie (avec entre autres une dame nature magnifiée), une bande originale osée mais finalement raccord font de ce "Mention particulière" une totale réussite qui offre en prime une belle leçon de courage, de partage, d’amour et d’amitié, bref une sacrée leçon d’humanité.
Et je terminerai ce commentaire par deux choses. La première est de regarder les deux épisodes à la suite, ça vous permettra de bien rester dans le récit. La seconde, c’est de ne pas vous inquiéter sur la diction de Marie Dal Zotto : elle peut sembler difficilement compréhensible pour ceux qui ne sont pas habitués, mais on s’y fait très vite. Maintenant, vous avez toutes les cartes en main pour aborder "Mention particulière", disponible en replay sur MyTF1, de même que l’interview de Marie Dal Zotto, cette improbable comédienne qui m’a véritablement époustouflé au cours de cette fiction au point d’en être admiratif comme je l'ai rarement été.
Une fiction que je n'aurai de cesse de recommander.

Stephenballade
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le 7 juin 2020

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