L'annonce d'un nouveau Men in Black avec en personnage principal une figure féminine avait tout pour faire écho aux daubes féminisées tirées des franchises phares de notre enfance. Si c'était inquiétant, c'est aussi parce que le film, à la base prévu comme un crossover avec la duologie 21 Jump Street, s'est finalement changé en une sorte de reboot non avoué tournant autour de la paire star de Thor : Ragnarok, Chris Hemsworth et Tessa Thompson.


Tout laissait présager que le film serait navrant; le manque d'imagination souvent lié à la venue de deux célébrités ayant déjà travaillé ensemble, le réalisateur de Fast & Furious 8, F Gary Gray (qui fit cependant le très sympathique Que Justice soit faite) et sa mise en scène terriblement lisse, Liam Neeson qu'on sait être le méchant dès les premières images, et tout une ribambelle d'humour gras qui semble ne contenter que les américains simplistes.


Mais voilà : si l'on s'alarme au début, la tension retombe au bout d'une demi-heure environ (quand Thompson entre chez les Men in Black), en comprenant que l'on tient, avec Men in Black : International, un nanar d'une trempe qu'on n'avait plus vue depuis le Death Note de Netflix (c'est quand même un peu mieux que l'autre daube, mais cela ne vole pas bien haut et parvient à faire pire que le second volet).


Ce serait un affront que de vous énumérer toutes les incohérences, les problèmes de logique, de sens ou de seul bon sens de ce qui se déroule à l'écran; vous savez pertinemment, peut-être même avant de l'avoir vu, que c'est une débâcle scénaristique; n'évoquons pas non plus la qualité de l'intrigue qui se pense intelligente avec ses révélations éventées et ses fausses pistes grossières, nous ne sommes pas venus pour cela.


La franchise Men in Black vaut avant tout pour le bestiaire d'extra-terrestres qu'elle propose, et force est de constater qu'International est honnête là-dessus; Gray n'y étant pas allé de main morte sur les nouvelles espèces, elles pullulent à l'écran mais laissent ce goût de mise à jour qu'on retrouve dans la plupart des relancements de franchise des années 2010, comme si tout mettre sur un même niveau de modernisme fade allait enrichir l'univers adapté.


Les aliens, tout bien faits qu'ils soient, font irrémédiablement penser à ceux que l'on peut trouver dans les nouveaux Star Wars, Star Trek, même à une version Charlotte aux fraises des monstres des Hellboy de Guillermo del Toro. Il en va de même pour ses décors, semblables à ceux des pseudo franchises de Science-fiction aux codes couleurs basés sur le succès des Gardiens de la Galaxie, Detective Pikachu en tête.


Sa réalisation elle-même, fagotée par les idées mercantiles des producteurs, a perdu l'essence de ce qui faisait l'efficacité sombre de Que justice soit faite; il nous imprime ainsi en pleine rétine une photographie colorée et généreuse en effets numériques comme on en voit dans la plupart des blockbusters d'été, avec un supplément porté sur les lasers appréciable quand on a grandi avec Star Wars et un sens certain de l'action, qui font qu'on ressent finalement quelques émotions face à un bordel numérique comme on croirait, au départ, en voir de partout (mais à la finition impeccable).


Gray sait comment filmer l'action et le fait en conséquence; parfois poussif (en témoigne la trop longue séquence de course-poursuite à Marrakech), il fait cependant preuve d'un savoir-faire qu'il a surement gagné en tournant Fast & Furious 8 : ses scènes d'action, sans avoir aucune personnalité ou sens de l'esthétisme, respectent avec une certaine rigueur ce qu'il est nécessaire de faire dans un blockbuster moderne, avec l'action, les plans qui partent dans tous les sens en gardant une certaine lisibilité, et des effets de lumière et de couleurs en reflet direct sur l'objectif, histoire de prouver que les Gardiens ont fait des émules inventifs.


Cette poudre aux yeux contente mieux que la photographie sans âme, toujours terne de la plupart des films américains populaires (notamment ceux du MCU et du WODC, en PLS depuis des années) et c'est surement pour cela que je lui accorde autant de sympathie. Parce qu'au milieu de cette bouillasse numérique infâme et sans aucune émotion, de cette écriture bordélique et jamais maîtrisée, de cette mise en scène fade et sans grande invention couplée à ces acteurs en roue libre complète (Chris Hemsworth prouve, une nouvelle fois, qu'il ne sait jouer la comédie qu'avec le costume de Thor), la photographie ultra-colorée donne une véritable valeur-ajoutée à ces scènes d'action généreuses au point de parfois trop en faire.


Dommage que les couleurs se résument à une succession de tons de bleu, de rouge et de blanc à l'aspect toujours très numérique. C'est décidément la trinité des couleurs des blockbusters des années 2010, qui trouve ici un agencement plutôt réussi et formellement joli. Vous aurez vu largement mieux ailleurs, mais ces couleurs qui éclatent font un grand bien quand le paysage cinématographique à gros budget actuel se contente de rendre ses visuels ternes et monochromes.


C'était mauvais, mais avait au moins le mérite de détendre sans trop chercher à arnaquer son spectateur. Par contre, pour le bien de l'humanité, n'en faîtes pas de suite.

FloBerne

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