Libre adaptation du roman autobiographique 100 Coups De Brosse Avant D'Aller Dormir, rédigé en 2004 par Melissa Panarello qui scandalisa l'opinion publique italienne de par la crudité des rapports sexuels qu'elle vécut durant son adolescence, Melissa P. 15 Ans n'est pas, à l'instar du livre, une œuvre agréable à visionner et se voit donc peu appréciée par une grande majorité de spectateurs. Le roman s'est pourtant vendu à plus d'un demi-million d'exemplaires en Italie, a été distribué dans 40 pays et a été traduit dans plus de 30 langues, touchant le cœur de milliers d'adolescentes qui se sont indéniablement reconnues dans le personnage de Melissa. Un malaise sociétal planétaire et tabou devant lequel les politiques et autres soutiens sociaux préfèrent rester muets, à l'image des non-réactions face au fléau de la prostitution estudiantine. Et bien que l'autrice n'ait pas vraiment apprécié l'adaptation cinématographique de son histoire, il n'en reste pas moins que le long-métrage reste dominé par la superbe performance de la jeune comédienne espagnole María Valverde qui incarne à merveille cette adolescente en quête d'identité sexuelle et d'elle-même.

Melissa a quinze ans, l'âge de l'extraordinaire attente, du vertige face aux premiers désirs sexuels, du plaisir et des sentiments. L'âge où sur les rivages torrides de Sicile comme ailleurs, on rêve d'un garçon qui vous offrirait tout à la fois. Romantique jusqu'aux bouts des ongles, elle jette son dévolu sur le beau Daniele qui, lors d'une fête, l'entraîne derrière un bosquet. Elle croit alors que son rêve va se réaliser, mais c'est à une fellation qu'elle se voit forcée. Au lieu de rompre immédiatement avec lui, elle se plie aux propositions libertines qu'il lui fait régulièrement et Melissa se retrouve entraînée dans une descente aux enfers que personne, dans sa famille, ne soupçonne, à part sa grand-mère. Les rencontres les plus scabreuses se succèdent et la réputation de l'adolescente pâtit de cette frénésie qu'elle n'a pas la force de refuser…

En ne trouvant que cruauté, violence, lâcheté, désir de jouir et d'humilier chez les hommes qu'elle croise, Melissa s'engage dans une spirale de vice, de destruction et d'obscénité. Un peu à l'image des deux adolescentes dans le sulfureux et bien-nommé Mais Ne Nous Délivrez Pas Du Mal, réalisé en 1970 par Joël Séria et interdit de projection durant 2 ans par le biais de l'office catholique, Melissa aborde une sorte de voie vengeresse envers les hommes en exacerbant une sexualité débridée qui lui procure, finalement, autant de mal-être que de honte à travers le plaisir incandescent de dépasser ses limites. La rencontre avec cet inconnu bien plus âgé qui se métamorphose en séance BDSM qu'elle n'est pas prête à assumer démontre amplement le jusqu'au-boutisme de son inconsciente démarche autodestructrice.

Réalisé par Luca Guadagnino, qui divisera quelques années plus tard les cinéphiles en réalisant le remake de Suspiria, Melissa P. 15 Ans reste une proposition dont les nuances, pourtant omniprésentes, semblent ne pas avoir été identifiées par de très nombreux spectateurs. Visiblement choquée par la nudité d'une adolescente (María Valverde avait pourtant 18 ans lors du tournage) qui OSE prendre un bain, se masturber et faire l'amour dans son plus simple appareil, l'opinion publique condamne fermement le film depuis sa sortie en l'accusant de faire l'apologie de l'éphébophilie. La même stupide polémique s'est par ailleurs récemment abattue sur Mignonnes de Maïmouna Doucouré, prouvant aisément que notre société a un sacré problème de morale à régler.

Au-delà de la pseudo-sexualisation attribuée au personnage de Melissa, c'est peut-être le mal-être adolescent dans un format dit "réaliste" qui dérange si violemment le grand public. L'excellent Thirteen de Catherine Hardwick, qui relate également une histoire vécue, en fait les frais depuis 20 ans. Sujet encore tabou, les descentes aux enfers d'enfants et d'adolescents au cinéma doivent impérativement se vêtir de métaphores ou d'éléments fantastiques pour être appréciées par un public adulte. En ce sens, il est tout à fait "naturel" que le parcours de Melissa, brut et graveleux, ne puisse être considéré à sa juste valeur psychologique.

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le 19 oct. 2023

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