Premier long métrage de Thomas Hardiman, il est difficile de dire que Medusa Deluxe s'inscrit dans la continuité de ses courts tant les trois oeuvres n'ont que peu de points communs si ce n'est peut être une volonté de proposer une expérience peu commune. Car après avoir présenté un faux documentaire animé et une absurde rencontre sous-titrée, Hardiman se lance dans la réalisation en plan séquence d'une sombre histoire de meurtre lors d'un concours de coiffure.

Si le film commence de manière alléchante avec une cinématographie fort soignée, des coiffures permettant la création de plans forts originaux et des traits d'humour jouant avec les comportements insupportables des personnages (l'autoproclamée Proud Female qui en devient une agresseuse, le coiffeur blanc parlant de traditions ghanéenne à une femme d'origine kenyane...), assez rapidement j'ai tout de même commencé à sentir que qu'il ne tiendrait pas toutes ses promesses.

Je suis en général assez client des films tournés en plan séquence, qu'ils soient réels ou bien camouflés (comme c'est le cas ici me semble-t-il), mais dans Medusa Deluxe le procédé donne l'impression de n'avoir été qu'une idée de base à laquelle on s'est accroché malgré les contraintes. En effet, il tire son originalité dans sa manière d'aborder le Whodunit en abandonnant toute figure d'enquêteur pour privilégier l'obtention des informations via les discussions personnelles des personnages, mais crée ainsi un film enchainant les dialogues où l'on a très vite l'impression d'entendre constamment les gens parler et d'avoir juste des transitions où l'on les voit marcher entre deux conversations. Le plan séquence est plus impressionnant lorsqu'il filme des actions marquantes que lorsque la caméra tourne autour de personnages en train de se tailler le bout de gras - quelques scènes à la fin du film viendront briser ce fonctionnement et sont, à vrai dire, plutôt stylées mais ne suffisent pas à décrocher de cette impression globale d'un procédé artificiel car non adapté à son récit.

La manière de filmer est agréable mais loin d'être novatrice, s'inscrivant dans la lignée des films indépendants stressants et éthérés comme le studio A24 (que l'on retrouve à la production du film) a pu déjà en produire ces dernières années, Climax et Good Time en tête - le final dansant complètement injustifié accentuant fortement cette impression de Climax du pauvre.

Alors que le film se perd dans des sous-intrigues globalement inutiles, le final nous scotche en nous révélant que le tueur est bien le mec hyper louche qu'on a vu essuyant du sang dans les 15 premières minutes du film nous dévoilant ainsi une flemme scénaristique impressionnante même pour moi qui suis habituellement peu regardant sur le sujet.

A l'image de la coiffure des participantes du concours servant de contexte à toute cette histoire, Medusa Deluxe s'avère irréprochable techniquement mais incapable d'être réellement captivant, prouvant ainsi qu'une prouesse technique n'est rien sans un réel travail d'écriture et une certaine originalité dans la mise en scène. Ceci dit cela reste très bon pour un premier long-métrage.

arthurdegz
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le 22 août 2023

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