A sa sortie, Marche à l'ombre avait été un carton. Pendant de longues années, il est resté, à mes yeux, une référence de comédie française réussie. Une trentaine d'années plus tard, force est de reconnaître qu'il a plutôt mal vieilli (alors que d'autres comédies de l'époque ont gagné en puissance). Sur un postulat faussement proche de Viens chez moi j'habite chez une copine (qui, pour le coup, s'est bonifié avec l'âge), il se trompe de route trop de fois pour être aujourd'hui tout à fait convaincant.
Michel Blanc joue le Woody Allen du pauvre de façon trop exagérée dans ce film pour ne pas finir par être pénible. Gérard Lanvin, en pleine ascension populaire, commence à en faire des caisses même s'il maîtrise plutôt bien ici son côté "grande gueule au grand coeur". Si on ressort quelques scènes marquantes (celle du pétard notamment) et quelques répliques amusantes (les dialogues de Michel Blanc restent la principale force du film aujourd'hui), il ne reste qu'une bluette sentimentale insupportable qui prend une place démesurée avec une Sophie Duez aussi expressive qu'une huître. Ce deuxième fil rouge du film finit par en casser le rythme.
On peut toujours apprécier la peinture sociale d'une époque (même si elle manque globalement de finesse), la description pertinente de combines à dormir debout, quelques passages amusants, mais tout est trop caricatural pour emporter l'adhésion. Le personnage de Michel Blanc est trop lourd, l'improbable histoire d'amour prend trop de place, l'amitié entre les deux hommes finit par être trop convenue. L'abondance de clichés, notamment dans la réalisation, est, enfin, très pénalisante. L'ensemble reste sympathique, mais plus le film vieillit, plus ses défauts sont visibles et lui font perdre de sa pertinence.