Superman Begins

Le plus super des super-héros s'offre un dépoussiérage grand luxe. En même temps, vous avez vu l'équipe qui assure le job ? Christopher Nolan et David S. Goyer. L'objectif est clair : après Batman, on ressuscite l'homme d'acier ! Sauf qu'à la barre, on retrouve Zack Snyder. qui en connait un rayon en adaptation. Il s'est quand même chargé de 300 et Watchmen, deux œuvres distinctes imaginées par deux auteurs encore plus distincts, Frank Miller et Alan Moore. Le muscle et les burnes d'un côté, le cœur et la cervelle de l'autre. Si le péplum dopé aux aux hormones (et aux fonds verts) m'a laissé de marbre, je ne peux lui ôter sa fidélité au roman graphique. Réciproquement, j'ai bien plus apprécié film tiré du classique de A. Moore tout en pestant sur certaines fautes de goûts bien de chez Snyder (stylisation outrancière). Qu'en serait-il du super-héros originel ?

L'association était belle, le résultat se contentera pourtant d'une réussite timide. Goyer et Nolan ne singent pas leur labeur sur Le Chevalier Noir. L'approche est raccord avec les thématiques humaines charriées par le mythe, mais elles ouvrent également les bras au space-opera (toute la partie sur Krypton). Un aspect quelque peu délaissé par les précédentes versions, apportant de bellles perspectives puisqu'elles fournissent contexte et motivations à Jor-El (père biologique de Sup') ainsi qu'à son ennemi Zod. La partie terrestre, qui va et vient dans le temps, se révèle moins distrayante puisqu'elle arpente en terrain déjà maintes et maintes fois labouré depuis 1978. Néanmoins, Zack Snyder se montre un peu plus sage à la caméra, en tout cas pendant une partie du film (la première). Il n'est pas devenu un limier de la subtilité, mais je constate que les comédiens ont de l'espace pour jouer. Il arrive même que de vraies émotions traversent l'écran. Notamment par le biais de Russell Crowe et Kevin Costner, qui rivalisent de charisme. Henry Cavill n'est pas en reste rassurez-vous. La tâche n'était pas aisée (réincarner l'icône au S sur le plastron) et l'acteur s'en sort très bien. Pour ce qui est la relation avec Loïs Lane, par contre c'est assez balisé donc pas très reluisant.

Tout cela file plutôt bien pendant la première moitié. Hélas, les mauvaises habitudes ont la vie dure. Man of Steel fait la même erreur que bien des blockbusters modernes, qui ne savent tisser un climax et des enjeux sans tomber dans la grandiloquence et les échelles démesurées. Sitôt que les esprits s'échauffent, c'est Snyder qui se lâche. Trop. Évidemment, un être extra-ordinaire ne peut pas se contenter de se débattre avec des névroses ordinaires. Il faut qu'on ressente sa force, si possible face à des adversaires aussi puissants que lui. Surtout qu'on a les moyens de le faire sans basculer dans le ridicule. Le tout est d'arriver à un ratio idéal entre quantité et qualité. Ce qui n'arrive pas avec cette relecture. Certains moments fonctionnent (le duel final) mais la transition entre le registre intimiste et Dragon Ball Z est plus que brutale. L'abus d'effets visuels met à distance de l'action et des enjeux/personnages puisqu'ils se retrouvent étouffés par les doublures numériques ou les buildings concassés. Il est d'autant plus regrettable que les 90 premières minutes avaient correctement posé quelques bases (la Krypton eugénique, par exemple). Voir tout cela se dissoudre dans la soupe digitale a de quoi agacer.

Malgré un tableau final mi-figue mi-raisin, je serai quand même bienveillant envers Man of Steel, grâce à sa distribution impeccable. Je donne aussi un bon point aux quelques menus efforts consentis par Snyder sur la forme, ainsi qu'aux bonnes pistes ouvertes par le script. Ce Superman là aurait pu s'envoler très haut, pour le moment il faudra se contenter d'un altitude stationnaire dans le paysage super-héroïque.