Ce film, et c'est une honte, est présenté au 46e festival du cinéma américain de Deauville. Il est, là c'est une insulte, en compétition. J'espère que ceux qui l'ont sélectionné ne l'avaient pas vu, sans quoi il s'agit d'une faute professionnelle ou d'un grave symptôme de sénilité.


Love is love is love se présente comme un film à sketches. Le spectateur aura donc, pour le prix d'une histoire, trois historiettes. On connaît l'écueil majeur du genre : les sketches sont bien souvent inégaux. Ici, nous en savons gré à Eleanor Coppola, les trois histoires sont d'une valeur égale : elles sont nulles.


Two for dinner repose sur une idée très faible. Un homme et une femme séparés par les kilomètres se retrouvent via FaceTime pour un dîner en amoureux. Il ne suffit pas de se servir des nouvelles technologies pour faire du cinéma moderne, loin de là. On a droit à un bavardage ennuyeux d'une quinzaine de minutes, avec une mise en scène d'une pauvreté déconcertante se résumant au plan fixe sur l'écran d'ordinateur. Les dialogues sont écrits sans talent et les quelques tentatives lamentables pour nous arracher un sourire (le voisin de table dragueur) tombent à l'eau. On a qu'une hâte : que les tourtereaux demandent l'addition.


Sailing Lesson nous fait suivre un vieux couple qui tente, en passant une journée sur un voilier, de raviver la flamme. Ils naviguent...naviguent...Comme il n'y a pas de vent ils utilisent le moteur. Et c'est alors que le réservoir du bateau est vide ! Le coup de la panne, mais involontaire et sur l'eau... Et c'est tout ? Oui, à peu près. Je ne vous dis pas s'ils s'envoient en l'air ou non. De toute façon, on ne voit rien.


Late lunch est le plus long des trois sketches. Il est même interminable. Caroline a perdu sa mère dans un accident de la route. Elle a convié à un déjeuner huit femmes qui l'ont (plus ou moins bien) connue. Le repas est l'occasion pour chacune d'elle d'évoquer la formidable et délicieuse personne qu'était Claire. L'occasion aussi pour Eleanor Coppola d'agrémenter sa soupe d'une pincée de féminisme et de progressisme si mous et consensuels qu'ils ne mangent pas de pain. On croit rêver devant la bêtise et la lourdeur des dialogues. On apprendra que la défunte avait accompagnée Nancy à la clinique pour se faire avorter. Qu'elle avait fait un chèque à Wendy, sans même la connaître, pour son association caritative. Qu'elle avait pardonné à Milly d'avoir couché avec le père de Caroline. Qu'elle a toujours soutenu son amie lesbienne Jackie. Une française est là, qui a apporté une boîte de chocolats, les préférés de Claire, et qui se souvient qu'elles avaient visité le Centre Pompidou. On se pince. Gloria, la bonne espagnole qu'on n'avait pas vue jusqu'à présent, aura elle aussi droit à une coupe de champagne. Voyez comme cette bourgeoisie est magnanime et progressiste : même les domestiques peuvent goûter au divin nectar.


Les dix dernières minutes sont plus réjouissantes, tant la nullité devient risible. Et c'est un plaisir rarement goûté que d'entendre une salle rire aux éclats devant ce qui se veut émouvant, sérieux, solennel. Caroline a dressé pour sa mère un petit autel, près duquel chaque femme dépose un objet. Une pierre, une photo, un pistolet à eau (!)... Le plan sur l'autel est si laid et le mauvais goût si clinquant que quelques spectateurs ont commencé à hurler de rire. Une chanson de la piètre Rita Wilson a aussi emporté un beau succès. Mais les abysses de la médiocrité comique sont atteints lors d'une scène de claquettes d'un ridicule rarement égalé (et ce raccord sur des verres de vin qui vibrent...)


Tout, dans Love is love is love, est mauvais et poussiéreux. Du début à la fin. L'horrible et envahissant piano qui sert de musique, les dialogues, les situations, la mise en scène. Reste à éclaircir un mystère : comment un pareil navet a-t-il pu être sélectionné dans un festival comme celui de Deauville? Vu le prix des places, les organisateurs ont des comptes à rendre.

MonsieurPoiron
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le 10 sept. 2020

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