Comment rester objectif face à un projet comme Louise en hiver ? Avant même de l'avoir vu, on ne peut qu'éprouver de la sympathie pour un film qui avec la plus grande politesse du monde s'échine à emmerder les conventions stipulant qu'en 2016 un film d'animation doit forcément se montrer léger, rythmé, coloré, jeuniste, moral, tous publics et à la pointe de la technologie.


Oui, la petite Louise, sous ses airs de mamie neurasthénique, fait un gros doigt à l'héritage de Mickey Mouse et lui crache à la gueule. Elle tire à boulets rouges sur toutes les princesses Disney de pacotille avec leurs problèmes de pacotille. Ne vous méprenez pas, je suis comme tout le monde, j'ai été biberonné par Disney et je continue régulièrement à téter goulument sa mamelle opulente et le lait qui en sort tous les six mois environ. Seulement cela m'étonnera et me réjouira toujours que des films comme ceux de Laguionie puissent encore voir le jour en 2016, époque du tout-cynique et de la culture rentable.


Alors Louise, donc. Elle est seule, Louise. Et à défaut d'avoir eu la chance de naître rentière blonde aux yeux bleus, elle va tout de même hériter d'un royaume qu'elle n'a pas demandé. Certes, en nombre d'hectares, le sien ne paie pas de mine et la triste allure de son château balnéaire ferait glousser Elsa ou Raiponce.


Non, ce royaume s'apparente plus à une forteresse de solitude, prend la forme d'un monstre menaçant qui effraie d'abord Louise avant qu'elle ne s'en accommode et ne l'apprivoise. Abandonnée et oubliée par la civilisation, par les siens, chavirée par les notes bleues d'un pianiste fantôme, elle réorganise le fil de sa vie en remontant celui de ses quelques souvenirs, gravant la solitude éternelle de l'âme humaine sur des paysages de Canson pastels.


Avec au bout du voyage ré-initiatique, au bout de ce périple intraordinaire et des éclats de poésie paisible, un grand et beau message de sagesse qu'il serait vain de résumer avec des mots, un message pourtant aussi simple qu'une vieille dame s'éloignant paisiblement sur les bancs de sable chaud avec son nouveau compagnon de route, réjouie par la promesse d'un automne clément.

magyalmar
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le 20 déc. 2016

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magyalmar

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