Une fois n'est pas coutume mais aujourd'hui, je me propose de commenter le documentaire que j'ai vu au cinéma cet après-midi sur la peinture de Goya.

C'est pour moi une découverte car j'avoue que je connaissais très peu de choses sur l'œuvre de Goya et que je ne savais même pas situer correctement cet artiste dans le temps. A part les tableaux que tout le monde connait à savoir les deux "Maja desnuda" et "vestida" et le portrait en pied de "la duchesse d'Albe". Portraits qui semblent plus que liés, d'ailleurs puisque cette dernière en serait l'inspiratrice.

Le réalisateur ou directeur de la photographie (peut-être bien les deux en même temps) José-Luis Lopes Linarès présente l'œuvre de Goya à travers les yeux d'un des grands admirateurs, le scénariste Jean-Claude Carrière. C'est d'ailleurs ce dernier qui avait fait le scénario d'un film de Milos Forman que je n'ai pas encore vu, "les fantômes de Goya". De même, il a écrit plusieurs ouvrages sur le sujet.

Jean-Claude Carrière, qui a une relation particulière avec l'Espagne et en particulier avec Luis Bunuel, nous fait découvrir et décrypte avec érudition certaines œuvres connues ou pas. Il semble aussi que ce soit son dernier voyage en Espagne qui se transforme en un dernier pèlerinage car il se rend dans tous les endroits importants de la vie et de l'œuvre du peintre. De sa ville natale Fuentedetodos en Aragon (un nom symbolique "Fontaine pour tous") au musée du Prado à Madrid où sont exposées un grand nombre de ses œuvres. Comme s'il fallait qu'il nous délivre un dernier message sur l'artiste.

Le documentaire est monté sur un mode très classique sans effet d'aucune sorte sinon la voix claire de Carrière qui exprime simplement ce qu'il voit dans les œuvres de Goya. C'est en quelque sorte une visite guidée de ses œuvres tout en respect et en douceur. Avec une bande originale de musique classique et des voix de soprano qui magnifient les diverses peintures ou les paysages de l'Aragon et d'Espagne.

Par exemple, le tableau sur la moisson où les paysans sont heureux d'avoir achevé le travail. Mais ce qui y est pointé est plus subtil. Dans le lointain il y a un château féodal stylisé et sombre et au premier plan, il y a la meule qui, par l'effet de la perspective, se trouve plus éclairée et élevée que le château…

Ou encore, la peinture terrible de Chronos qui est en train d'avaler un de ses enfants ; cette peinture a été faite après les interventions militaires napoléoniennes en Espagne et pourrait être interprétée de diverses façons comme une allégorie simple sur le conflit entre jeunesse et vieillesse mais aussi comme une allégorie plus politique sur la révolution (française) qui dévore ses enfants …

Ou encore la thématique des visages peints dans un réalisme qui ne veut pas tricher avec la vérité. Il semblerait que Goya était atteint de surdité sur la fin de sa vie. Et j'ai trouvé convaincant et émouvant de retrouver cette surdité dans les regards des visages peints qui utilisent leur vue pour compenser ce qu'ils ne peuvent entendre. "Le silence, la chose du monde la plus difficile à entendre"

"L'ombre de Goya" est un passionnant itinéraire que nous propose Jean-Claude Carrière pour découvrir ce peintre mystérieux et profond qu'on classe peut-être un peu rapidement comme un peintre de cour. Alors qu'il fut un témoin de son époque en particulier des atrocités napoléoniennes en Espagne. "Yo lo vi" signera-t-il ainsi certaines gravures.


JeanG55
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le 23 sept. 2022

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