On est toujours surpris par la manière dont la critique, probablement de moins en moins cultivée, et le public, se laissent abuser par des films de piètre qualité, mais vendus avec des arguments clinquants.

Oui, l'image de Limbo est belle, avec ses forts contrastes à la Sin City, mais que nous dit vraiment ce maniérisme lorsqu'il est appliqué ainsi à un univers de dépôt d'ordures infini, figurant la ville de Hong Kong ? Que la forme est TOUT... et en effet, le fond du film est au mieux inexistant, au pire consternant. Car cette interminable enquête policière qui n'est qu'un invraisemblable amas de coïncidences et d'incohérences, menée par deux policiers qui ne sont que des stéréotypes, ne présente pas beaucoup d'intérêt : à la recherche d'un serial killer caricatural - qui aime sa maman à la main amputée et essaie de la retrouver chez les femmes qu'il séquestre - nos deux caricatures de flic feront tellement de choses absurdes qu'on ne peut éviter de décrocher de l'aspect "polar" du film, et de passer le temps, qui paraît bien long, à "admirer" l'image et, admettons-le en toute bonne foi, quelques moments de bravoure - en général des scènes de poursuite - bien mis en scène.

Et bien entendu, puisqu'on a du temps à perdre, à identifier les films que Soi Cheang a pillés - et mal - pour monter son escroquerie : Se7en, bien entendu, pour l'ambiance glauque et la pluie permanente, mais surtout The Chaser (et non pas Memories of Murder comme les "incultes" le disent) pour le radicalisme coréen.

Mais le plus désagréable finalement, ce sont ces idées bien toxiques qui transparaissent peu à peu au fur et à mesure que le film progresse : le tueur est un immigré sans abri, japonais au demeurant, tandis que les femmes ne méritent que de recevoir des coups, ou d'être violées si elles sont jeunes et jolies. Car l'absence de recul, de point de vue d'une mise en scène qui est avant tout dans la jouissance voyeuriste, autorise toutes les dérives idéologiques. Et ça, ce n'est même plus grotesque, c'est dégueulasse !

[Critique écrite en 2023]

EricDebarnot
3
Écrit par

Créée

le 24 août 2023

Critique lue 466 fois

8 j'aime

2 commentaires

Eric BBYoda

Écrit par

Critique lue 466 fois

8
2

D'autres avis sur Limbo

Limbo
mymp
5

Tu t'es vu quand t'abuses ?

Un flic vétéran, une jeune recrue avec qui il doit faire équipe, un serial killer qui rôde, une ville en pleine déliquescence, des personnages qui expient, qui endurent et se questionnent… Ça ne vous...

Par

le 19 juil. 2023

40 j'aime

5

Limbo
Arthur-Levain
3

Zhìchǐ (2021)

On peut communément trouver (au moins) trois raisons de surnoter un film.La première, récurrente, est l'incapacité au discernement.La seconde, très fréquente, est la provenance dudit film ...La...

le 20 oct. 2023

28 j'aime

13

Limbo
limma
8

Critique de Limbo par limma

Soi Cheang renoue avec un cinéma sombre et âpre au scénario classique mais qui réserve quelques trouvailles filmiques aptes à rendre son ambiance bien noire et désespérée. Un binôme de flics en...

le 26 sept. 2021

20 j'aime

4

Du même critique

Les Misérables
EricDebarnot
7

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

le 29 nov. 2019

204 j'aime

150

1917
EricDebarnot
5

Le travelling de Kapo (slight return), et autres considérations...

Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...

le 15 janv. 2020

190 j'aime

104

Je veux juste en finir
EricDebarnot
9

Scènes de la Vie Familiale

Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...

le 15 sept. 2020

184 j'aime

25