• Vous savez, Tony m'a dit que vous étiez son frère aîné. Vous a-t-on déjà dit que vous agissez comme son père ?

  • Je suis son père depuis qu'il a 4 ans, mais aussi sa mère. Je ne le comprends pas tout à fait. Alors comment voulez-vous le comprendre ? Ce gamin a des problèmes.

  • J'imagine que son frère aussi.

  • Nous parlons de Tony.

  • Je parle de vous, maintenant. Je connais une partie du problème de Tony. Mais je vous observais, vous aussi. Ne serrez pas les poings, M. Sinclair. J'ai déjà vu des bandits repentis.



Libre comme le vent est un western dramatique efficace, sans le moindre humour, réalisé par Robert Parrish, présentant une histoire qui prend à contre pied, avec des moments dramatiques très fort, ainsi qu'une atmosphère particulière. Robert Parrish propose un western intimiste sur la repentance, et la transmission dans lequel Robert Taylor excelle, en tant qu'éleveur vénéré comme un héros ( de par son ancien statut de flingueur jadis redouté ) par son jeune frère John Cassavetes, qu'il a élevé comme son propre fils. Un rôle paternaliste qui a influencé Taylor, au point de le transformer en homme meilleur, délaissant son arme pour le bétail.


Robert Taylor fait surtout preuve de personnalité dans le rôle de Steve Sinclair, un ancien bandit qui s'est amendé, vivant et travaillant paisiblement dans son ranch. Seulement, pas de répit pour les repentis. Tony Sinclair ( John Cassavetes ), son jeune et fougueux frère revient dans le ranch familial un pistolet à la main, ainsi qu'avec Joan Blake ( Julie London) une chanteuse sexy de saloon qu'il compte bien épouser. Alors que Taylor tente d'inculquer des valeurs paisibles à son frère, celui-ci ne rêve que d'une chose, s'affirmer en tant que nouvelle fine gâchette dans l'intention de suivre le passé tumultueux de son grand frère.


John Cassavetes est hallucinant ! son interprétation est sans failles, amenant une force sidérante à son personnage. Le comédien amène beaucoup d'intensité et d'excitation au spectacle proposé. Il incarne un cowboy qui n'arrive pas à s'intégrer complètement dans son propre clan, toujours dans une recherche désespérée d'exister, d'avoir de l'importance, qui se traduit par une manière très conviviale de se manifester, avec un contact physique constant, il veut clairement être aimé. Toute cette volonté de montrer qu'il existe le pousse à toujours aller plus loin. Il se présente comme le protecteur de son grand frère, qu'il voit maintenant vieilli. Il se perfectionne à l'art du pistolet, finissant par abattre un ancien tueur considéré comme la fleur des tireurs. Son acte de bravoure n'aura fatalement que pour effet de réveiller en lui un instinct de tueur. Un chien fou trop accroché à l'ancienne image de son grand frère, voulant finalement dépasser la figure forte et emblématique qu'incarnait Taylor.


Robert Parrish gère admirablement bien son récit, décortiquant les relations avec une grande fluidité et un flair, suscitant des moments d'inspiration authentique. Ses personnages ne sont jamais caricaturaux, même la comédienne Julie London à la voix d'or échappe à l'image fragile et sexualisée de l'épouse tombant amoureuse. Elle est le témoin, de cette lutte fratricide, devant lequel elle assiste impuissante à la transformation en meurtrier de son fiancé. Le cinéaste braque obsessionnellement sa mise en scène, sur les changements impulsifs de Cassavetes, mais également des personnages gravitant autour de lui. Il délivre une part sombre stupéfiante de l'image humaine, qui se brise brusquement, entraînant avec elle son lot de conséquences. L'action est très secondaire, l'intensité est avant tout dramatique. L'intérêt cinématographique se situe dans cette confrontation fraternelle, mais également contre l'excellent Royal Dano dans le rôle de Clay Ellison, ainsi que Donald Crisp pour Dennis Deneen.


Libre comme le vent est un film visuellement impressionnant avec son environnement. Un sacré paquet de décors magnifiques s'illustre tout du long, c'est très étonnant. Des grandes prairies avec des champs de fleurs violettes, avec toujours en arrière-plan des montagnes enneigées. Il n'est pas rare de trouver des westerns avec des décors superbes, mais il faut reconnaître que là on est sur un tout autre niveau. Avec ces paysages impressionnants des Rocheuses du Colorado capturés efficacement par les photographies CinémaScope et Technicolor de George Folsey, le film prend en qualité. Il est tout de même à regretter une durée de vie bien trop court, avec une explication finale entre les deux frères trop rapide, certes sous tension, mais pas à la hauteur du récit.


CONCLUSION :


Libre comme le vent est un western réalisé par Robert Parrish, qui présente une intrigue intimiste mettant en avant un récit solide et nuancé, avec des comédiens impressionnants, surtout John Cassavetes qui est incroyable et possessif. Un film qui avait tout pour devenir une oeuvre importante, mais qui va trop vite, rushant malheureusement son final. Néanmoins Libre comme le vent reste à voir pour sa proposition tragique et fascinante.


Un western sincère et dur.

Créée

le 26 juin 2020

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