Derrière ce titre ironique de critique se profile une légère déception ; comme quoi, c'est bien de revoir des films et de les réévaluer, je ne l'avais pas revu depuis les années 80 en VHS et j'avais donc noté de mémoire à mon arrivée sur SC. Du coup, je baisse ma note pour les raisons suivantes :
1) Richard Lester est un bon réalisateur, doté d'un certain sens de l'humour, mais ce qu'il a choisi comme option pour cette énième adaptation du père Dumas, ne me convient pas vraiment, il a opté pour la fantaisie, et ça ne fonctionne pas pour moi qui suis plutôt académique sur les classiques de ce type. Les mousquetaires de Dumas, c'est comme des mythes, des légendes, de beaux héros qu'il ne faut pas trop abimer, or ici, Lester les rend un peu grotesques dans des duels totalement chaotiques, car il refuse carrément les duels à l'épée qui sont la carte de visite des mousquetaires. D'Artagnan, Athos et les autres ont l'air de se battre comme des chiffonniers, un coup d'épée par ci, un coup par là, mais plus souvent des bousculades et des ruades ridicules. Ceci ne me plait pas, j'aime les beaux duels, et par rapport aux versions précédentes du roman, ça tranche vraiment. Même dans la version catastrophique de Paul W.S. Anderson de 2011, il y a des duels réussis, comme dans la version Disney de 1993.
2) Le recours aux situations incongrues, aux effets comiques et aux gags parsemés ça et là peut surprendre ; par moments, c'est bienvenu et en d'autres, ça ne l'est pas du tout ; Constance qui reçoit un mannequin de bois en pleine tronche, je trouve pas ça rigolo mais stupide. Balancer un garde du cardinal dans la flotte, ça passe et ça a été fait ailleurs. Il y a donc des libertés prises qui ne conviennent pas et qui frôlent la bêtise. Trop de gags tuent le gag, et au bout du compte, ça finit par agacer.
3) Je regrette qu'avec notre patrimoine architectural et nos beaux paysages, le film n'ait pu se tourner en France ; certes les lieux espagnols choisis sont sympas, mais ils font justement trop espagnol dans leur style. Mais je crois que l'Espagne est dans la co-production, ceci explique cela.
4) Les personnages n'ont pas des caractères assez définis, ils sont certes très différents et très amis, mais ils sont à peine esquissés ; D'Artagnan est un fougueux jovial, bien incarné par Michael York, Athos incarné par un non moins bon Oliver Reed, est un anxieux sévère, bien que Lester n'ait pas trop insisté sur son aspect d'ivrogne pathétique. Aramis incarné par un excellent Richard Chamberlain est un précieux ironique ; quant à Porthos incarné par Frank Finlay, il est assez rustique et un peu bourrique, ou alors c'est une impression.
Si j'excepte ces 4 raisons, mais surtout les 2 premières, je vois quand même un spectacle qui ne m'ennuie pas c'est toujours ça, toutes ces libertés prises par Lester me contrarient un peu, mais ça reste un honnête divertissement. S'il pouvait faire ce genre de farces douteuses sur Superman dans ses 2 opus de 1980 et 1983, ça n'est guère acceptable sur les mousquetaires de Dumas, on peut dépoussiérer pour ne pas imiter les 37 versions déjà réalisées, mais ne pas aller trop loin non plus. Or, Lester a franchi la limite.
Louons aussi son casting étincelant : se permettre Charlton Heston en Richelieu, Faye Dunaway en Milady, Geraldine Chaplin en reine Anne d'Autriche, ou Raquel Welch en Constance Bonacieux, c'était un pari risqué ! Sans oublier 2 Français comme Jean-Pierre Cassel en Louis XIII et Georges Wilson en Treville. J'aime bien aussi les facéties de Planchet joué par l'excellent Roy Kinnear, et la distinction british de Simon Ward en duc de Buckingham.
A noter enfin que Lester a tourné 2 films en continuité : la première partie intitulée les Trois mousquetaires (the Three musketeers, the Queen's diamonds) et la seconde partie, On l'appelait Milady (the Four musketeers, the Revenge of Milady) qui furent distribués en France en 2 parties et sortis à un an d'intervalle ; sinon la projection complète est d'une durée de 3h30. Je ne ferai donc pas de critique sur On l'appelait Milady, vu que les 2 films sont du même tonneau et avec le même casting principal.

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le 5 déc. 2018

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