--- Bonsoir, voyageur égaré. Te voila arrivé sur une critique un peu particulière: celle-ci s'inscrit dans une étrange série mi-critique, mi-narrative, mi-expérience. Plus précisément, tu es là au sixième épisode de la cinquième saison. Si tu veux reprendre la série à sa saison 1, le sommaire est ici :
https://www.senscritique.com/liste/Vampire_s_new_groove/1407163
Et si tu préfère juste le sommaire de la saison en cours, il est là :
https://www.senscritique.com/liste/Secret_of_the_Witch/2727219
Et si tu ne veux rien de tout ça, je m'excuse pour les parties narratives de cette critique qui te sembleront bien inutiles...---


Un seul film mauvais, et tout est dépeuplé. Diable, quelle lâche je fais, moi qui me faisais une joie immense de ce mois sorcières, il aura suffi d’un seul mauvais film pour que je baisse les bras ! Diantre, j’ai passé la journée à me plaindre, et le soir venu, j’ai saisi la première occasion pour me dérober à ma tâche. Ce mois qui commençait si bien, bondissant de film en film, galopant de critique en critique, sans une interruption, sans le moindre retard, tout cela anéanti par le pouvoir d’un seul. Quelle tristesse… Mai je me suis ressaisie. Puisque la Hammer me manquait trop, j’ai rajouté un film à sorcière cachée au programme (l’étoffer plutôt que l’abandonner, c’est une drôle de stratégie, mais force est de constater de son efficacité), et puisqu’il n’y aura pas de Universal Monsters, j’ai créé un nouveau cycle : le giallo. Ou plutôt, pas exactement, puisque les historiens du cinéma semblent tous d’accord pour dit que si le genre naît bien entre les mains de Mario Bava, cet honneur n’est réservé qu’à son sixième film, La Fille Qui en Savait Trop. Pas mention non plus nul part ni du très mauvais film d’avant-hier, ni du très attendu Suspiria. Qu’importe, j’invente le genre s’il n’existe pas, je décrète que les film fantastique d’épouvante italien des années 60-70 formeront un cycle. Bien. Je ne suis pas vraiment sure cela dit qu’on pouvait rattacher le film de ce soir au cycle en question…
Pourtant tout partait bien : nous sommes en 1967 (donc au beau milieu de la période cible), le film s’appelle Les Sorcières (on n’aurait pu faire plus explicite pensais-je), et est archi-italien (jugez plutôt : Luchino visconti, Pier Paolo Pasolini, Vittorio De Sica, Clint Eastwood, Ennio Morricone, Dino De Laurentiis. Archi-italien, j’ai dis). En plus, nous partons sur un film à sketch, donc cinq fois plus de chances de rentrer dans les clous. Hm. Nop.
Le film n’est donc pas, jamais, à aucun moment, un film de sorcières fantastico-horrifique. Le terme « sorcière » est bien souvent entendu dans un sens métaphorique (métaphore que je ne comprend pas d’ailleurs dans le cinquième film), et quand il est retenu dans son sens premier, c’est lors de contes absurdes et hauts en couleurs. Pas de quoi se braquer pour autant, car si j’ai fais une erreur de casting en sélectionnant le film pour l’inclure au nouveau genre que je viens d’inventer, je me satisfait de l’avoir fait figurer au programme du mois-sorcières, et surtout, je me réjouis de l’avoir découvert tout court. Car les cinq films, très différents les uns des autres, n’ont chacun rien à envier à leurs voisins de programme. Même le générique est à lui seul une petite œuvre d’art (lequel sera d’ailleurs le seul endroit ou l’on pourra voir des sorcières au nez crochu et au chapeau pointu en croisière à dos de balai). Pour ma part, j’ai particulièrement accroché sur l’essai de Visconti, et notamment son début, avec ses jeux de reflets, de miroirs et de tromperies, qui s’imbriquent entre scenario et visuel. Je retiendrai surtout cette formidable scène de jalousie morbide, ou une horde de femmes tente de déconstruire la star gisant sur le canapé. Se mentant entre elles et à elles-mêmes, elles prennent un plaisir mesquin à retirer les artifices de ce corps idéalisé, pour en enlever l’étoffe divine et n’en garder que la femme. Visconti nous dépeint un portrait de femmes dont la jalousie dissimule un profond mal-être, les poussant à détruire celle qui a été idéalisée pour se prouver que seule une paire de faux-cils et une perruque les séparent de la gloire. J’ai moins apprécié sa deuxième partie, ressassant le thème de la comédienne dont la gloire scelle le destin.
Je retiendrai sûrement également, pour des raisons plus mitigées, la fable dingue de Pasolini, où des personnages cartoonesques cherchent macabrement une remplaçante pour le rôle féminin de leur maisonnée, le précédent étant décédé. Proposant ainsi des femmes interchangeables, où il ne fait guerre de différence d’en prendre une autre ou de garder la même après la mort, tant qu’elle fait le ménage et qu’elle reste désirable, Pasolini joue la provocation comme à son habitude, enrobant son propos acerbe de couleurs et de pantomimes singeant tour à tour Jacques Tati ou les Looney Toons.
A mon goût, et même si je reconnais leurs formidables réussite, les trois autres films resteront tout de même plus anecdotiques. Tous droit basés sur un scénario bien ficelé et fait pour le format court, ils proposent tous des idées de situations scénaristiques, visuelles ou sonores absolument délicieuses, rendant l’ensemble du film comme un petit trésor, ou plutôt un joli collier de cinq perles raffinées, qui chacune mise cote à cote, crée un bijou parfait et précieux.
Au fait, c’est ma centième critique, champagne !
Zalya
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le 27 oct. 2020

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Zalya

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