Grâce à la technologie, à des gens qui ont fait le choix de filmer ce spectacle, à quelques cameramans et au téléchargement illégal, j'ai pu vivre un peu l'expérience de ce monologue unique.


Quand Guillaume Gallienne le jouait au théâtre de l'Ouest Parisien puis à l'Athénée-Louis-Jouvet, je n'étais encore qu'une petite gourde de 14-15 ans qui préférait High School Musical aux histoires transcendantes. Oui, le temps arrange les choses parfois. Mais qu'est-ce que j'aurais adoré voir ça en vrai. La Moi d'aujourd'hui, si profondément touchée, passionnée et obsédée (n'ayons pas peur des mots) par ce qui se passe devant et derrière les rideaux rouges du théâtre.
- Il est tout de même vrai que j'ai pu me rattraper le week-end dernier et découvrir Gallienne sur la scène de la salle Richelieu à la Comédie Française, en Lucrèce Borgia. Ce détail me semblait important, hé hé. - Mais le voir jouer son spectacle presque autobiographique en vrai de vrai, ça devait être quelque chose.


Le film adapté de la pièce, sorti dans les cinémas en 2013, est ce que j'ai découvert en tout premier de Guillaume Gallienne. A l'époque, j'avais déjà trouvé cette histoire formidablement orchestrée et unique. Puis je l'ai revu hier, ce film, et ça a confirmé mes émotions passées (malgré quelques longueurs à des moments pas trop intéressants, mais passons). J'ai alors ressenti une envie, comme évidente, de me pencher sur la pièce de départ.


La pièce de théâtre originale est un MIRACLE.
Tout y est parfaitement dosé. C'est intime, c'est profondément drôle et touchant, c'est tout de même un peu triste et ingénu. Ce Guillaume paraît si fort de conviction et de personnalité, et pourtant si fragile et blessé tout à l'intérieur. Je voulais courir dans ses bras et tout lui dire. Lui faire comprendre que non... il n'est pas anormal et il ne doit rien à personne. Mais en fait, le spectateur apprend quasiment tout en même temps que lui. C'est d'autant plus troublant.
Guillaume aime infiniment sa mère (qu'il imite à merveille) et les femmes en particulier. Il a appris toute sa vie à les regarder et à les écouter. Guillaume est traversé par les femmes, il s'imprègne de leurs faits et gestes et tend une oreille attentive au souffle des femmes. Il est même persuadé d'en être une. J'aimerais être la femme de Guillaume. D'un Guillaume, peut-être. J'aimerais être regardée, écoutée et comprise comme il le fait sans cesse. Guillaume est emprunt de délicatesse et de poésie. Rien ne l'arrête. Pas même ce qui lui fait peur, ce qui le choque, pas même le bizutage et l'homophobie qu'il connaît si jeune, pas même l'incompréhension et les complexes, pas même la froideur glaciale qui s'émane parfois, souvent de sa mère et de son entourage. Rien ne le tue. Il est à fleur de peau mais c'est sa force.


Guillaume Gallienne est d'une justesse, d'une finesse rare chez les acteurs d'aujourd'hui. Il joue tous les rôles de toutes ses histoires, et ce avec une énergie débordante et contrôlée (v'là l'oxymore). Il danse la Sevillanas, il mime à merveilles un massage sportif et une irrigation du colon, il rappe sur Le Misanthrope de Molière, il parle espagnol et anglais comme si on y était, il monte à cheval en lâchant les rênes et les étriers. Sa performance est extraordinaire.
Les cancans et les moqueries concernant sa tenue noble, son côté au-dessus et son statut de sociétaire de la Comédie-Française n'atteignent pas du tout mon jugement. Après tout... La différence effraie. Et pour lui comme pour moi, c'est une seconde nature de faire peur.


Guillaume Gallienne, merci. Tu peux être fier de toi. Moi je suis fière de toi. Et j'ai hâte de voir quelles autres surprises tu me réserves. Peut-être qu'un jour on se croisera sur les planches du Français... ou ailleurs. Qui sait?

AndyDD
10
Écrit par

Créée

le 15 févr. 2016

Critique lue 1.4K fois

4 j'aime

10 commentaires

AndyDD

Écrit par

Critique lue 1.4K fois

4
10

Du même critique

Éperdument
AndyDD
7

(É)perdus

Cet après-midi, j'ai séché la moitié d'un cours de dramaturgie au conservatoire. Je déteste ça, sécher. J'ai toujours eu une conscience de la taille de Fleury-Mérogis. Je n'ai jamais eu d'heure de...

le 8 mars 2016

21 j'aime

8

Thelma et Louise
AndyDD
10

Le film ultime sur les femmes

Susan Sarandon et Geena Davis sont ici Louise et Thelma (j'ai inversé les deux prénoms parce que c'est Susan en #1 et puis c'est tout), deux meilleures amies qui décident de partir en road trip le...

le 9 juil. 2015

20 j'aime

9

The Diary of a Teenage Girl
AndyDD
10

Petite croix rouge

C'est sans hésitation aucune que j'ai accordé un beau 10 à ce beau film. Il s'agit selon moi d'un film important, un film différent, un film qui dépasse ce à quoi je m'attendais d'un teen-movie...

le 27 août 2016

19 j'aime

3