Plusieurs années aprèsUne femme dangereusede Walsh et quelques années avant Le salaire de la peur de Clouzot, Jules Dassin tourne ce Thieves' Highway qui raconte lui aussi l’histoire de conducteurs de camions qui doivent se méfier des virages dangereux.

Bien qu’il s’agisse indéniablement d’un film de genre « séries B », que le comportement de certains personnages surprenne parfois et que le « happy end » soit un peu négligemment amené, Thieves' Highway tient la route – osons le jeu de mots, grâce principalement à un scénario bien ficelé, mais aussi à une fluidité très appréciable, une belle peinture du monde des Halles, des personnages secondaires globalement bien explorés dont Rica - Valentina Cortese - au double rôle assez intéressant.

Dans ce monde des Halles, avec son grossiste mafieux et ses hommes (et sa femme !) de main, ses transporteurs prêts à tout pour de l’argent (quitte à tromper son partenaire ou à le conduire indirectement à la mort) et les clients dont les vertueuses valeurs disparaissent aussitôt qu’ils voient l’ombre d’une bonne affaire, l’amoralité frappe : le dollar y est roi et l’on peut tuer, voler, corrompre ou encore mentir sans le moindre scrupule. Un grand cynisme y sévit, dans ce microcosme régit par la loi du plus fort.

Or, au fil des vols, manipulations, morts et meurtres, les intérêts personnels s’estompent et les personnages retrouvent progressivement une apparence humaine, comme par miracle, s’entraidant désormais, faisant preuve de solidarité et de compréhension mutuelle, si bien que le film se découpe en deux parties qu’on pourrait politiser : la première montrant une vision sauvage du capitalisme (individualisme et intérêts économiques), la deuxième ayant une approche plus communiste (partage du capital et de biens, solidarité des travailleurs, idéal de justice) – n’oublions pas que Jules Dassin est un ancien membre du PC, ce qu’il l’a conduit à être inscrit sur la liste noire de Hollywood et à quitter les E.U.

Un film plaisant.

Marlon_B
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le 4 oct. 2022

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Marlon_B

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