Un film humain à défaut d'être incisif

Les 2 Alfred fait partie de ces films que leur thématique rattache immédiatement à plusieurs autres. Son sujet, à savoir l’uberisation de la société et les difficultés posées par l’utilisation des nouvelles technologies, était déjà celui du très dur Sorry we missed you et du très mauvais Effacer l’historique. Deux films qui ont été réalisés il y a moins de deux ans. On est donc parfaitement dans l’air du temps. Disons-le tout de suite, le film de Bruno Podalydés est bien plus réussi que celui de Kervern et Délépine, tout en étant sans surprise plus doux et tendre que celui de Ken Loach. Mais il n’est pas exempt de défauts pour autant.

Tout comme le film du duo de Grolandais -et d’ailleurs avec le même acteur dans le rôle principal- Les 2 Alfred aligne les situations loufoques et décalées autour des difficultés d’adaptation que connaissent ses personnages. Toutefois on ressent ici immédiatement bien plus de sympathie pour eux, car Podalydés n’en fait pas des semi-crétins mais des gens finalement assez attachants et normaux qui doivent s’adapter à un monde qui l’est disons un peu moins. Surtout qu’ils s’humanisent et gagnent en épaisseur au fur et à mesure que l’histoire avance.

L’aspect critique sociale du film est sans conteste le moins réussi. Ça reste trop gentil, trop loufoque pour vraiment être incisif. De plus, Les 2 Alfred n’est pas toujours très juste dans la représentation de ce qu’il dénonce. Par exemple la politique de l’entreprise qui vise à interdire à ses employés d’avoir des enfants est montré comme quelque-chose de forcément subi et immoral, alors qu’on sait pourtant qu’un nombre croissant de gens font ce choix de vie et n’hésiteraient pas à rejoindre ce genre de boite. C’est d’autant plus dommage que la scène ou chacun fait son « coming out » autour de la table de réunion est incontestablement la plus forte et la plus réussie du film.

Bref à défaut d’être vraiment percutant dans ce qu’il dénonce, Les 2 Alfred n’en reste pas moins une bonne comédie qui fourmille de petites trouvailles, même si elles partent parfois un peu dans tous les sens. C’est surtout un film profondément humain ce qui vaut souvent tous les discours. Sandrine Kiberlain est splendide comme toujours et Denis Podalydés est décidément en train de s’imposer comme le M.Hulot du nouveau millénaire.

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