Après les fracassantes découvertes de Où est la maison de mon ami ? et Le goût de la cerise, Le vent nous emportera semble apporter une forme d'aboutissement à tout un système esthétique. La concision et l'épure de l'argument narratif (une équipe de tournage se rend dans une bourgade kurde de l'Iran), son opacité et son aura mystérieuse (les éléments de contexte sont fournis au compte-goutte et jamais vraiment explicités), la mise en scène à la fois documentarisante (la caméra saisit des intrusions éphémères d'objets ou personnes par des panoramiques hasardeux) et d'une picturalité marquée (jamais l'inscription de la figure humaine au sein de son environnement n'a été aussi organique chez le cinéaste, et sa mise en valeur des paysages par la lumière et la couleur aussi sublime), agissent de concert pour générer un état de lâcher prise sensoriel et cérébral du meilleur effet. Avec pour projet de conter sur un mode symbolique et poétique l'ouverture au monde d'un être égoïste et fermé d'esprit, tout en offrant la description d'un sens du détail inouï, presque romanesque, d'une faune et d'une flore spécifiques, Le vent nous emportera récompensera au centuple les spectateurs les plus téméraires. Magnifique.