La filmo de Bergman est longue comme un dimanche passé devant Antenne 2 mais beaucoup moins rébarbative. Du moins, de ce que j’en sais car mon expérience sur le sujet ne peut être que maigre au regard de ce qui reste à voir. Du coup, tant qu’à y être autant se faire un de ses films les plus reconnus. Nous sommes dans un moyen âge flou. Un chevalier et son écuyer reviennent des croisades où ils ont tué et répandu la foi. Sur la route vers le doux foyer, ils croisent des pestiférés, des femmes condamnées pour sorcellerie, des saltimbanques et des villageois hystériques. Ha et ils croisent la mort aussi, avec qui le chevalier engage une partie d’échec pour gagner du temps. On ne s’y attend pas mais la première chose qui frappe, c’est l’humour. D’autant qu’il est assez piquant et irrévérencieux. L’ironie constante repose la question du bien-fondé du dogme religieux et de la morale chrétienne. Cet humour, les femmes vont aussi pas mal en faire les frais et on aura le droit de n’apprécier que moyennement une misogynie un peu datée. D’un autre côté, les deux sujets se télescopent et cette collision permet de clouer au pilori le patriarcat de l’Église. Bref, chacun y verra ce qu’il voudra. Une autre thématique forte est celle de la présence de la mort parmi les vivants. Comment elle façonne l’imaginaire et comment elle dialogue avec les peurs individuelles. En creux, se pose la question du destin ou de la mission à accomplir par le condamné, sachant que chacun l’est. A la mise en scène, on appréciera particulièrement l’irruption toujours cocasse et presque anecdotique de la personnification de la mort, chichement vêtue d’un pyjama noir contrastant avec son visage blême. On kiffera pas mal aussi l’exercice de repérage de tous les symboles cachés ça et là. Enfin, on se repassera certaines scènes absolument magiques qui rappelleront par leur intensité dramatique le choc visuel d’un Eisenstein, des tableaux somptueux. En bref, il faut accepter de se confronter au puzzle sémantique et peut-être de ne pas être sûr d’avoir tout compris mais au bout du chemin, c’est un très bel ensemble de surprises que Bergman nous donne à voir.