San Carlos, petit village poussiéreux, est rebaptisé Zinc Town. Il est dépossédé de son nom, comme ses habitants sont dépossédés de leur terre et de leurs maisons, le tout au profit d'une grande société minière et des banques qui collaborent avec elle. Une société dont les employés survivent dans des bidonvilles et travaillent dans des conditions de sécurité catastrophiques. C'est d'ailleurs la question de la sécurité qui entraine une grève des mineurs. Grève qui sera au centre du film, qui suivra en particulier le destin d'une famille, les Quintero.
L'histoire de cette grève et de cette famille ne constitue pas, à mon avis, l'intérêt principal du film. Les évènements s'enchaînent de façon trop démonstrative, les intentions politiques du cinéaste rendent la fin évidente et la propagande est très maladroite. Car il s'agit, bien entendu, d'un film de propagande, tourné de façon clandestine dans l'Amérique Maccarthyste.
La réalisation est franchement mauvaise et l'interprétation ne relève pas le niveau. Jamais le cinéaste ne parvient à nous faire adhérer à ce combat. Jamais le spectateur n'est vraiment impliqué dans ce qui arrive. Les scènes de rassemblements syndicaux, qui devraient provoquer un engouement chez les spectateurs, tombent à plat.

Mais l'intérêt est ailleurs. Il est dans la description d'une société qui, à 60 d'écart, est exactement la même actuellement. Une société de consommation qui ne propose que des achats comme seul horizon culturel, et des crédits comme seuls espoirs de réussite ("Le crédit, c'est la plaie des travailleurs", dira un des personnages). Une société de répression où la police et la justice sont des alliées objectives des grandes entreprises, afin de pressurer les travailleurs. Une société de peur, où on emploie des travailleurs immigrés parce qu'ils sont corvéables à merci, et parce qu'ils sont utiles pour faire peur aux travailleurs Américains. Une société qui n'offre aux plus faibles que l'exploitation et la répression. Une société d'injustices qui est présentée comme la seule garante des libertés individuelles ; mais quelles libertés ? Les libertés pour qui ? Des libertés à quel prix ? Est-ce que ce sont même de véritables libertés ?
Un film militant donc, très maladroit, et plus intéressant par la société qu'il décrit que par l'action qu'il raconte.
SanFelice
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le 15 juin 2013

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