Tout condamné à mort aura la tête tranchée

Pagnol a toujours raconté que cette histoire était vraie : c'est pendant le tournage d' Angèle que l'idée lui est venue car un pauvre garçon naïf et crédule vint assister à des prises de vue ; les machinistes le persuadèrent qu'il ressemblait à Charles Boyer (alors grosse vedette de l'époque) et lui signèrent un contrat bidon. Il se présenta quelques temps après au studio de Billancourt dans le bureau du producteur qui le renvoya promptement avec billet de train en poche. C'est donc à partir de cette anecdote que Pagnol qui s'aperçut que le monde était plein de "schpountz", a construit son film ; l'expression venant de son directeur de la photo d'origine slave.
En mêlant des souvenirs de ses débuts aux studios de Joinville sur les réalisateurs fantaisistes et les producteurs-margoulins, il commença le tournage sans même avoir un scénario définitif et écrivant les dialogues au jour le jour, donnant à chaque comédien son texte le matin avant de tourner. Cette improvisation a certainement contribué à l'étonnante liberté de ton du film, et ça n'a pas empêché Pagnol de ciseler un dialogue parfois très riche, on en a un magnifique exemple dès le début du film qui commence fort par la scène de la cuisine où Fernandel fait savoir aux siens qu'il n'est pas destiné au métier de l'épicerie ; le dialogue entre Fernandel et Charpin est d'une saveur vraiment cocasse, avec un festival de répliques mémorables, dont la plus fameuse est celle de l'oncle à son neveu : Tu n'es pas bon à rien, tu es mauvais à tout.
On se souvient aussi du superbe numéro de Fernandel déclamant le fameux article du Code civil "Tout condamné à mort aura la tête tranchée" en différents modes d'expression (crainte, pitié, affirmatif, pensif, comique...).
Truculent et chaleureux, émouvant et sensible, le Schpountz est une peinture assez pertinente des milieux du cinéma dans les années 30, on y sent la passion de Pagnol pour ses personnages et une véritable chaleur humaine qui se dégage tout au long de cette comédie picaresque ; ça passe d'autant mieux que Pagnol s'entoure une fois de plus de sa famille de comédiens fétiches (Fernandel, Charpin, Orane Demazis, Robert Vattier, et dans de petits rôles Maupi dans celui du barman, et Alida Rouffe en cliente à l'épicerie). Enfin, le film est aussi un peu l'histoire de Fernandel qui se destinait à une carrière de tragédien mais qui découvrit qu'à cause de son physique, il était destiné à jouer les acteurs comiques. Une comédie dirigée de main de maître, où Fernandel trouve un de ses meilleurs rôles.

Ugly

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