C’est pas toujours facile d’être fan de Jackie Chan. J’admire ses talents de cascadeurs, mais ses meilleures performances ne se trouvent pas toujours dans des films globalement bons. Malgré tout, je continue d’explorer sa filmographie, dans l’espoir d’assister à encore quelques unes de ses prouesses. Du coup hier soir, après le très mauvais Flic de Hong-Kong, j’ai quand même voulu enchaîner avec un autre film de Jackie. J’ai opté pour un autre sorti la même année, à la note moyenne encore plus basse, Le retour du Chinois. Un titre français vraiment merdique il faut l’avouer, qui essaye de se raccrocher à Le Chinois, alors que les deux films n’ont aucun rapport, l’un se nomme The big brawl en VO, et le film qui nous concerne, The protector.
Le seul rapport, c’est qu’il s’agit de deux des premiers films américains de Jackie, avec L’équipée du Cannonball où il tenait un rôle mineur.


Je pense que j’aurais été plus enthousiaste si je m’étais renseigné davantage, car j’aurais vu que le réalisateur, James Glickenhaus, est celui d’Exterminator / Le droit de tuer, petit classique du cinéma grindhouse. Je ne l’ai pas vu, mais le titre et l’affiche sont assez évocateurs d’un film d’action bourrin bien 80’s.
Du coup, The protector fait vraiment intrus dans la filmographie de Jackie Chan, et le film déconcerte dès le début, en présentant ce qui semble être un univers post-apocalyptique, où des nains et des punks en tenues de cuir rafistolées braquent un camion, au milieu d’immeubles en ruine.
Ah bah non, en fait c’est juste une journée "ordinaire" à New York. D’accord.
On sent que The protector lorgne du côté des Dirty Harry, quoiqu’en plus bis, déjà le titre fait penser à The enforcer, le troisième film de la série d’Eastwood, et parmi les affiches internationales il y en a une qui fait de Jackie une sorte de Bruce Lee équipé d’un magnum.
Jackie joue Billy Wong, un flic dur à cuire armé d’un flingue, et qui pour une fois, n’hésite pas à faire gicler le sang. Les bad guys sont des gros membres de gang sous coke, qui mitraillent tout le monde. Les corps des gentils comme des méchants sont criblés de balles, volent à travers des vitres, … Quand quelqu’un se fait plomber et chute d’un immeuble, il défonce au passage une immense enseigne lumineuse avant de s’écraser sur une voiture.
Il y a la violence over-the-top des séries B américaines des 80’s… mais avec Jackie Chan ! C’est incroyable.
The protector se vautre allègrement dans tous les clichés les plus cons, et les plus drôles, des bisseries de ce genre : le bateau qui explose à l’impact, le collègue du héros qui meurt (pour une fois que c’est pas la minorité qui clamse), le slow-clap lors du retour de Jackie, …
Même certaines répliques sonnent comme des formules entendues maintes fois.
Mais c’est d’un n’importe quoi jouissif, je vois plus ça comme une sorte de best-of de tout ce qui faisait la saveur des 80’s.
La décennie laisse sa marque dans l’esthétique aussi, j’ai retrouvé ces ambiances nocturnes que j’aime dans une ville crasseuse, éclairée aux néons, et la pellicule a un air vieilli, légèrement verdâtre ou d’un jaune pisseux.
Mais que serait un film pareil sans une VF savoureuse ? Il faut noter déjà que Jackie a la voix de Luke Skywalker, que son second acolyte joué par Danny Aiello (le restaurateur dans Do the right thing) a la voix de Stallone, et le méchant japonais celle de Doc Brown.
Les héros voulant évidemment sans arrêt afficher leur virilité, ils balancent des injures gratuites à tout bout de champ, désignant par exemple le méchant d’un "c’est vraiment une belle pute !", et nous servent des répliques soi-disant couillues complètement connes : "on a sorti nos armes" – "autant sortir vos queues" – "quand je sors ma queue, c’est pour m’en servir". C’est assez surprenant aussi d’entendre Jackie dire "putain". Et du côté des méchants, ça y va sur les répliques racistes, traitant souvent le héros de chinetoque.


Le kidnapping d’une femme et un trafic de drogue mènent le héros et son coéquipier à Hong-Kong, et c’est décidé en 2 minutes, sur un soupçon. J’imagine que c’était pour ajouter un peu d’exotisme. Jackie et son pote américain se retrouvent dans la situation bien classique où on leur dit d’abandonner leurs manières de cowboy et de se tenir tranquille.
Les héros n’hésitent à se la couler douce en traînant dans un salon de massage, et j’ai commencé à trouver le sidekick de Jackie un peu douteux, à faire des blagues grasses en draguant les employées, on croirait qu’il est là pour du tourisme sexuel.
Ah bah non, en fait, ça n’était pas une illusion. Les filles se déshabillent complètement, et de série B, The protector passe complètement dans le genre du cinéma d’exploitation. Première fois que je vois de la nudité full-frontal dans un film de Jackie Chan, et ça continue quand on voit une série d’employées d’un labo de drogue, défiler dans le plus simple appareil. Comme on l’apprend dans American gangster de Ridley Scott, c’est pour s’assurer que personne ne vole, mais ici il n’y a aucune explication, on pourrait croire que c’est totalement gratuit.


Habituellement le cinéma de Jackie Chan, c’est du cinéma d’action tout public, sans sexe, et où personne ne meurt. Au pire, on voit une paire de fesses, à des fins comiques, et le film de Jackie le plus scabreux que j’avais dû voir, c’était Opération condor, qui me paraissait déjà dingue juste pour toutes ses allusions sexuelles.
Du coup, je ne suis pas surpris d’apprendre que l’acteur a fait remonter The protector pour sa sortie à Hong-Kong, ayant même tourné de nouvelles séquences.
Je pense que la version internationale a de quoi perturber les puristes, mais pour moi ce film c’est l’alliance de deux univers que j’adore, celui de Jackie Chan et celui d’action US bourrins.
C’est comme Commando, dans une moindre mesure : c’est complètement con mais c’est un énorme plaisir régressif.
Il faudra tout de même que je voie l’autre version, plus riche en combats, car même si dans le montage américain il y a quelques jolies cascades, c’est pas forcément ce que Jackie a fait de plus inventif.

Wykydtron IV

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