Le Rendez-vous galant de Carl
5.7
Le Rendez-vous galant de Carl

Court-métrage d'animation de Bob Peterson (2023)

C'est une idée unanimement reconnue que l'âge d'or de Pixar est désormais bien loin, et bien enterré. Désormais, ce sera au même rythme que les autres studios d'animation : des bons et des mauvais long-métrages, des aberrations et des trésors. Au moins, nous gardons la certification d'une animation de haute volée.
Mais les court-métrages, c'est différent. On rentre dans l'ordre de l'historique de chez historique. Certes, "Toy Story" est le premier long d'animation entièrement crée par ordinateur, mais il ne faut pas oublier "Les aventures d'André and Wally B" qui constitue le premier film tout court entièrement comme ça (il est ce qu'il est, il n'empêche qu'il faut se mettre à la place du public à l'époque !). A peine cette révolution effectuée, à peine Steve Jobs a apporté son grain d'argent, les mecs font animer un objet, une lampe par-dessus le marché, et en feront leur logo : qui y aurait pensé à part eux ? L'année d'après, c'est un objet qui revient encore, le monocycle pour "Red's dreams", et ils créent tout un drame autour. Enfin, "Tin Toys", qui annonce "Toy Story" : premier personnage humain en synthèse (forcément il est horrible, mais faut bien que quelqu'un fasse le premier pas même s'il est pas ouf, c'est comme...une demande de rencard !).
Tout ça, en l'espace de 4 ans (en terme de sortie).
Je parle juste par le prisme de révolutions, mais des court-métrages géniaux de Pixar, il y en a une pelletée ! "Red's dreams" n'a d'ailleurs rien perdu de sa verve émotionnelle, et est toujours un de leurs films les plus sombres. "Knik Knak", "Le joueur d'échecs", les hilarants et géniaux "Extra-terrien" et "Presto" (pour moi leur meilleur), "Jour Nuit" et sa créativité folle... Même quand c'était relié à leurs longs-métrages comme le "Baby-sitting" ou leur court où Rémy de "Ratatouille" défend les rats bienfaiteurs pour les humains, avec arguments concrets... Merde, c'était top, c'était novateur, la vraie marque de fabrique du studio, qui faisait qu'ils pouvaient tout explorer sans être incohérent dans leur globalité ! Malgré que la fête ait commencé à se terminer, à partir de "Cars 2", leurs court-métrages se maintenaient : "Le parapluie bleue" et "Bao" m'ont marqués par leur tendresse, et toujours cette envie d'exploration d'autres univers qui rend ce studio si unique.
Mais comme on le sait, exactement de la même manière que le temps, Disney détruit tout. C'est pourquoi je ne cache pas que leur déculottée monumentale et internationale, en cette année 2023, me réjouit au plus haut point : j'attendais ça depuis au moins 10 ans. Quel sera mon principal argument de haine contre eux ? Ce court-métrage. Bien sûr, on pourrait se dire à raison que Pixar est le principal responsable, mais le style du film n'a absolument rien à voir avec le reste du catalogue, même ceux qui y ressemblent le plus. C'est une commande, j'en suis persuadé. Sinon, bah... Faut arrêter les courts, Pixar.
Que vous ne soyez plus au top permanent niveau long-métrages, c'est pas grave : après tout, le dernier en date à l'heure où j'écris cette critique, "Elementaire", est loin d'être une daube ! Mais il y a une grande différence entre rater son coup, et le déshonneur. Pour moi, "Le rendez-vous galant de Carl" n'est pas juste un film raté : c'est un effroyable aveu d'échec d'un studio qui m'a toujours habité, et je le souligne encore, un déshonneur.
Comment en arriver là ? Pourquoi un court-métrage aussi bavard pour rien, depuis quand ce sont vos meilleurs films qui sont les plus "bla bla bla" ? Pourquoi Doug ne se fixe plus à un point sans rien dire en voyant un écureuil, ce qui faisait un gag ultra efficace, et se met à aboyer comme n'importe quel toutou ? Pourquoi ce coup de fil où Carl semble répéter mot pour mot ce que vient de dire la femme à l'autre bout du téléphone, dialogue lourdingue et même amateur ? Pourquoi ces gags si faciles, notamment sur le fait de sentir les fesses (les enfants étaient morts de rire ahaha... non même pas en fait) ? Mais surtout, cette morale. Carl fait des efforts, veut se faire propre et bien, et il OSE mettre un parfum pour son rendez-vous ! Et t'a le chien, autrefois adorable mais ici gros casse-couilles, qui lui dit "mais tu es en train de te changer mon maitre ! Moi je t'aime comme tu es mon maitre ! Faut surtout pas changer ce que tu es !". C'est ignoble, parce que pour moi ça incite à la fainéantise intellectuelle, comme si le dépassement de soi pour atteindre un objectif c'était devenu rasoir, tant qu'on est soi-même tout va bien (c'est les voyous qui seront contents). Enfin vous avez compris l'idée, c'est idiot d'introduire cette morale-là alors que tout ce que fait le papy ballon, c'est se préparer à un rendez-vous en étant stressé... Mais le comble c'est la fin, avec Carl qui parle pendant 5 minutes (en tout cas c'est ce qu'il m'a semblé) à la photo d'Ellie, en insistant bien sur le fait qu'il l'aime et surtout que c'est une nouvelle aventure. Il y a juste à se dire qu'Ellie est encore vivante et face à lui, pour que Carl passe pour ce qu'il n'est pas : un gros queutard. Il ne pouvait pas tout simplement caresser la photo avec un petit sourire puis partir, il fallait forcément qu'il se justifie devant, en paraissant le plus gentil possible aux yeux du public pour que ce rendez-vous passe mieux (rendez-vous que Carl n'a même pas l'air de désirer fortement en plus...). Sans oublier Doug qui l'accompagne, pour que ce rencard soit le moins intime et le plus gênant possible... Pourquoi, Pixar, ce court-métrage est-il aussi niais, aussi guimauve ? Y'avait des médailles de scout à gagner chez Iger ?
Comment passer de l'émotion d'une lampe, à ce gâteau indigeste ? Pour le propos "restez vous même", "Drôles d'oiseaux sur une ligne à haute tension" est mille fois mieux, par sa subtilité, par son imagerie et ses symboles efficaces, par sa morale qui se fait d'elle-même, et non forcée comme un rond enfoncé dans un putain de carré. Quand à la forme, et surtout l'audace, autant dire que c'est niveau zéro : le décor bouge à peine. Strict minimum pour la musique. Quelle tristesse...
Je mets 2 parce que Christian de Smet parvient, parmi ce marivaudage, à instiller de la surprise : il remplace très bien le regretté Charles Aznavour. C'est toujours ça, et je ne veux pas mettre un 1 à Pixar...
J'espère que le prochain rendez-vous sera autrement plus excitant, mais bon... Surprenez-moi, surprenez-nous.

Billy98
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le 9 juil. 2023

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Billy98

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