Deux lycéens se retrouvent au milieu d’un parc en plein après-midi. Ils discutent, se promènent, s’embrassent. Puis vient la nuit.
On pourrait, dans un premier temps, reprocher au beau film de Damien Manivel quelques défauts symptomatiques du film de fin d’études (même s’il n’en est pas un). Avec une approche théorique très marquée et une sensation d’étirement de certaines scènes, dans la seconde partie, visant à gonfler un moyen métrage en un long (le film dure 1h10).
Et pourtant le film fait son effet, durablement, et ces défauts disparaissent laissant en tête l’étrange beauté de l’objet.
Le Parc est construit en deux parties, une diurne et une nocturne.
La partie diurne est d’une douceur infinie, lumineuse, bucolique, candide, rêveuse, gracieuse. Elle aborde la naissance d’un amour adolescent. La mise en scène caressante, les bosquets, les chants des oiseaux, enveloppent les deux amis-amants, dans un écrin douillet. Comme deux petits oiseaux tombés du nid, ils sont perdus, empruntés, ne savent pas quoi se dire, ne savent pas comment se toucher. Mais plus ils s’enfoncent dans le parc, plus leur relation se dessine et se resserre.
SPOILER
Alors que leur amour semble culminer, le garçon annonce qu’il doit partir, laissant la fille seule au milieu du parc.
Vient alors la plus belle idée du film. Un très long plan fixe, une transition, le jour tombe peu à peu, les ténèbres envahissent l’écran, pendant que les deux lycéens continuent d’échanger par SMS. Ce plan merveilleux, qui raconte uniquement par la mise en scène le passage d’une idylle amoureuse à une déception douloureuse, un cœur brisé, est un point de rupture, un basculement. On entre dans la nuit et dans le conte fantastique. Le film, de plus en plus étrange, de plus en plus inquiétant, s’enfonce loin dans les broussailles, se perd, et rencontre le loup.
Avec trois fois rien mais énormément d’idées de cinéma Manivel aborde l’adolescence sous un angle très juste, transmettant toutes les sensations et émotions liées à cette période par l’unique biais de la mise en scène. C’est très beau.

Teklow13
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le 24 mai 2016

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