Il s'agit d'une très jolie chronique familiale (à tendance sociale) avec une narration assez originale où la même période est montrée tour à tour depuis le points de vus des 3 enfants (sans que les faits ne se recoupent vraiment) : la jeune fille qui rêve d'évasion, le grand frère obèse et retardé mental et le jeune frère chétif et timide. Cela dit la structure est assez déséquilibrée puisque le 3ème segment (sur le cadet) dure une dizaine de minutes. Il fut sans doute victime d'un gros travail de remontage puisque la première version durait 4h et "seulement" 2h10 dans la copie définitive. La dernière partie souffre aussi d'une approche un peu précipitée et accélérée, ce qui lui empêche de fonctionner aussi bien qu'on aurait aimé l'espérer.
En revanche le procédé narratif marche plutôt bien et permet de s'attacher aux différents personnages qu'on apprend à connaître doucement. Sans chercher à émouvoir, le film demeure touchant avec quelques très jolis moment, surtout dans la partie centrée sur la jeune fille (dont une séquence fort poétique avec le parachute accroché au vélo et quelques jolis échanges avec un vieux joueur d'accordéon).
Il ressort tout de même un certain sentiment d'emprisonnement, d'enlisement avec des personnages qui arrivent difficilement à s'affranchir à la fois de cette ville, des mentalités conservatrices et du poids des traditions familiales (malgré les révolutions culturelles). Il y a ainsi plus de scènes graves que légères et l'amertume domine, teinté parfois de cruauté telle la douloureuse séquence d'empoisonnement d'une oie.
La réalisation est sobre, engluée dans la grisaille quotidienne, loin du style visuel qu'on peut trouver dans les films que Gu Changwei à photographié. Ca n'empêche pas quelques mouvements de caméra et de grues assez amples mais qui demeurent toujours discrets. C'est peut-même un peu trop académique, heureusement contrebalancé par une jolie direction d'acteurs, tous naturels et crédibles.