Entre un troisième Hunger Games catastrophique et un Divergente 2 pas loin d’être irregardable, Le Labyrinthe avait apporté un vent de fraîcheur inespéré sur le genre éculé des adaptations de romans young adult. C’était d’autant plus remarquable que le roman de Dashner, en dehors de son concept curieux et de quelques idées plutôt encourageantes, était un véritable calvaire à lire tant il semblait s’éparpiller inutilement sur des pistes narratives superficielles. Pourtant, une forte inquiétude demeurait en ce qui concernait cette suite. Déjà parce que le deuxième tome était encore pire que le premier, mais aussi parce que ce qui ressortait des bande-annonces n’avait rien de très rassurant – sans parler des critiques presse américaines assassines.


Le problème principal du livre La Terre Brûlée était son absence de structure. Dashner livrait un flot d’idées diverses et souvent difficilement compatibles – épidémie, zombies, télépathie, post-apo, et la liste continue – sans qu’il ne parvienne à construire une intrigue convaincante. Pour faire court, cela ressemblait à un brouillon inachevé, sans architecture de récit, avec des personnages désincarnés qui n’aidaient pas à rendre les enjeux un minimum engageants.
D’une manière encore plus marquée que pour Le Labyrinthe, l’équipe scénaristique a donc décidé de faire l’impasse sur bien des aspects de l’œuvre originale, dont on ne retrouve globalement ici que certaines péripéties et personnages. Pour faire court : La Terre Brûlée est une adaptation infidèle au possible, les adorateurs du livre crieront au scandale, mais soyons honnêtes, ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose.
La Terre Brûlée a beau être un film empli d’imperfections – la dramaturgie est presque inexistante, les acteurs ne sont pas toujours très convaincants, et ce dernier acte nanardesque est à oublier au plus vite – mais entre ces défauts prévisibles se cache cependant une surprise de taille : comme l’an dernier, la nouvelle itération de la trilogie Le Labyrinthe est d’une efficacité monstre. Le travail d’écriture fourni est encore une fois colossal ; cette affirmation pourrait en faire sourire certains, mais pour qui a lu les livres, ce n’est pas loin d’être une évidence. Le bouquin était illisible, tandis que le film est d’une clarté réjouissante.


L’histoire est palpitante, plutôt bien dirigée – plusieurs scènes intenses témoignent d’une belle maîtrise scénique – il est donc difficile de s’ennuyer devant La Terre Brûlée. Wes Ball sait décrire un univers sans inonder son spectateur de détails, il pose des objectifs simples, épure sa forme jusqu’à la rendre limpide. Il est tout simplement l’un des meilleurs faiseurs d’action de cette époque trouble pour Hollywood.
La Terre Brûlée ne révolutionne rien ; le film a beau être légèrement moins convaincant que son prédécesseur, il évite avec brio la catastrophe annoncée. Il s’essaie même à l’humour, et ça marche plutôt bien ; mais surtout, il possède ce feeling presque old school, à la fois dans cette peinture d’une fin du monde à l’australienne – on pense à Miller, à Michôd et à Hilditch – mais aussi en construisant ses personnages autrement que par le biais d’un triangle amoureux. La Terre Brûlée n’est pas vraiment un film young adult habituel, il est plus rude, moins immature, pas forcément plus intelligent, mais clairement moins ciblé : il se fait tout simplement plaisir.


Le bon coup de La Terre Brûlée est d’éviter ce qui aurait pu être son terrain de prédilection. Wes Ball réunit le meilleur des ersatz d’Hunger Games – les high concepts excitants et le dynamisme du récit – et tout ce qui a surement dû le fasciner dans La Planète des Singes ou chez Spielberg lorsqu’il était plus jeune. Ce n’est pas toujours très fin, il aurait mieux fallu se détacher totalement du matériel d’origine, la frontière avec la série B est parfois mince et le fond du film n’est pas très malin ; mais en tant que divertissement, La Terre Brûlée excelle. Ce n’est pas innovant, ce n’est pas très profond, mais la démarche est honnête et s’assume totalement. Non, Wes Ball ne pense pas réaliser une critique des médias sur fond de Battle Royale futuriste ; il s’amuse juste avec son road movie apocalyptique avec des zombies surpuissants, des rebelles de la montagne, des araignées robotiques, des proxénètes au goût douteux et des méchants scientifiques aux motivations ambiguës. On fait avec ce que l’on a, mais ça fait du bien de voir autre chose que des justiciers en costume.

Vivienn
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le 25 sept. 2015

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