Je l'ai vu petite, à l'époque ou la télévision passait encore quelques chefs d'oeuvres sur ses grilles de programmation du dimanche soir..
Cette deuxième séance m'a permis de me mettre comme en retrait de mes premiers souvenirs.
J'avais aimé ce film pour sa lenteur, sans le savoir à l'époque.
J'aime ce film aujourd'hui pour le souvenir d'une époque révolue; celle ou un homme peut commettre un acte irréparable et rester digne, ou il peut fumer son paquet de gauloises sans filtres sans soulever l'indignation des ligues anti-tabac, ou Jean Gabin n'est déjà plus tout à fait un jeune premier, ou Arletty est émouvante, presque belle, jouant dans un registre doux en de ça d'Hotel du Nord, ou le monde ouvrier existe toujours, mis en valeur par un cinéaste français qui ne se pose pas en intellectuel dépositaire de la Nouvelle Vague.
Et je l'aime aussi pour le souvenir de mon grand-père au regard bleu, au sourire un peu tordu sur le côté, au blouson de cuir râpé et aux mains d'ouvrier communiste de l'après-guerre.