Le Dernier Rempart est un film très attendu pour deux raisons.
D’abord, c’est la première réalisation outre-Atlantique de Kim Jee-woon. Le réalisateur coréen s’attaque à Hollywood après s’être fait connaitre du public avec le Bon La Brute et le Cinglé – sorte de western asiatique se voulant un vibrant hommage à Sergio Leone – et avec J’ai Rencontré le Diable (que Jean-Victor avait critiqué lors de sa sortie).
Ensuite, c’est le premier vrai retour d’Arnold Schwarzenegger devant une caméra, sa maigre prestation ratée dans les deux Expendables ne comptant pas vraiment. Le comédien devenu entre temps gouverneur de Californie avait choisi le réalisateur asiatique pour revenir à ses premiers amours, choix qui avait tout pour plaire.

Mais on ne va pas y aller par quatre chemins : malgré les deux noms précités, Le Dernier Rempart est loin d’être une franche réussite. Et ce n’est la faute à aucun des deux, ou pas trop.

Le gros point noir est l’histoire et sa narration. Le film commence sur une petite ville à la frontière mexicaine, un peu isolée, et qui se vide pour une occasion bien spéciale. N’y restent que les forces de l’ordre et une poignée d’habitants. On y fait la connaissance du shérif, un ancien et très bon flic de la cote Ouest venu trouver un peu de quiétude, et quelques uns de ses comparses dont celui incarné par Johnny Knoxville (Jackass), faisant fortement penser à Looping dans l’Agence Tous Risques pour le coté barjo/suicidaire.
Jee-woon prend bien le temps de poser ses personnages, tellement qu’on est surpris de voir l’histoire basculer d’un coup dans une grande ville où a lieu un transfert de prisonnier. Cette longue scène, pendant laquelle le dit prisonnier-baron de la drogue va s’échapper, aurait pu être un bon moyen de démarrer le film. Mais le fait de ne l’inclure que tardivement dans un récit déjà bien démarré casse le rythme et déroute le spectateur.

Le trafiquant va donc prendre la fuite à bord d’une voiture susceptible de rendre jaloux les gars de Fast and Furious et va donc, après avoir mis en déroute des flics tous plus nuls les uns que les autres, traverser le bled où Arnold veille au grain. Le spectateur est donc en droit d’attendre une longue scène d’action, un face à face d’anthologie entre les deux protagonistes. Malheureusement pour lui, il faudra attendre un bon moment pour y avoir droit. On préfère en effet s’attarder sur le parcours du Mexicain, dont on n’a au final pas grand chose à foutre, si ce n’est qu’il semble inarrêtable au volant de son prototype motorisé.

On se retrouve face à une histoire mal racontée, au montage foutraque, préférant se focaliser sur certains aspects pas intéressants pour un sou aux dépends d’autres, comme le personnage de Knoxville complétement sous-exploité. De fait, on sent que le film se cherche une tonalité : complétement sérieux par moment, il offre quelques passages drôles à base de petites phrases ou complétement loufoques. C’est à se demander si Jee-woon a eu le montage final ou si un producteur américain était derrière lui pour le recadrer et offrir un truc formaté.

C’est d’autant plus le cas que l’histoire pourrait être un gros épisode des Experts s’il n’y avait pas eu Arnold Schwarzenegger. Le comédien, très en forme, signe ici et malgré tout un vrai retour. Ultra charismatique, il porte le film de bout en bout et permet au spectateur de rester intéressé au sujet jusqu’à la fin, jusqu’à une fusillade finale un peu mollassonne mais elle-même suivie par un combat à mains nues sur un pont qui rappelle que l’ancien gouverneur sait encore jouer les gros bras. A 65 ans, le comédien n’a rien perdu de sa superbe quand il s’agit de distribuer des baffes ou de tirer des coups de feu, et ce même si quelques passages du film jouent avec son âge.

Dans sa longue carrière, Schwarzenegger aura tourné quelques films peu glorieux. Qui se souvient de Dommage Collatéral ou de la Fin des Temps ? Malheureusement, c’est plutôt de ce coté-là qu’il faut ranger le Dernier Rempart, à des millénaires d’un Terminator ou d’un True Lies. Sans l’apport du comédien, le film aurait sans doute directement fini dans les rayons d’un magasin de DVD, sans passer par la case cinéma tant son histoire est totalement mal branlée. Heureusement, Arnold est bien de retour et on a déjà hâte de voir son prochain film.
cloneweb
4
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Films vus en 2013

Créée

le 18 janv. 2013

Critique lue 382 fois

cloneweb

Écrit par

Critique lue 382 fois

D'autres avis sur Le Dernier Rempart

Le Dernier Rempart
real_folk_blues
6

Un flic à la maternelle

Autant Kim Jee Woon m’avait emballé sur son Bittersweet Life, autant I met the devil m’avait laissé de marbre ; trop long, trop sentencieux, et un peu surestimé, n’en déplaise à qui de droit. Autant...

le 23 janv. 2013

60 j'aime

14

Le Dernier Rempart
zombiraptor
7

Papy fait de la résistance

La filmographie d'Arnold pourrait être adaptée en BD. Ce serait un comics bien gras bien entendu, mais d'un enthousiasme et d'une générosité foisonnante uniques. Le héros, musculeux, friand de...

le 15 mars 2015

53 j'aime

12

Le Dernier Rempart
Pravda
7

Vous pensiez qu'Arnold était terminé... à tort !

Voilà longtemps que j’attendais avec une certaine impatience le retour d’Arnold au ciné dans un « vrai » rôle, puis hier, 20 heures, à l’affiche : « Le Dernier Rempart » ! Alors j’en suis sortie un...

le 31 janv. 2013

36 j'aime

15

Du même critique

Die Hard : Belle journée pour mourir
cloneweb
2

Critique de Die Hard : Belle journée pour mourir par cloneweb

On ne va pas y aller par quatre chemins : Piège de Cristal, sorti en 1988, a inventé le film d’action des années 90. Bruce Willis lui doit sa carrière post-Clair de Lune et nous une tripotée de...

le 15 févr. 2013

168 j'aime

24

Prometheus
cloneweb
5

Critique de Prometheus par cloneweb

Ridley Scott est un réalisateur adulé mais pourtant, en y regardant de plus près, on se rend compte qu'il a quand même une carrière en dents de scie à tendance plongeante. Les premiers longs-métrages...

le 28 mai 2012

86 j'aime

20

Raiponce
cloneweb
8

Critique de Raiponce par cloneweb

Évoquée dans le documentaire « Waking Sleeping Beauty », les studios Disney ont eu une période fastueuse jusqu'à la fin des années 90. L'entrée dans les années 2000 s'est fait plus douloureusement...

le 9 nov. 2010

83 j'aime

3