La fine équipe

J'aime bien Nicolas Cage. Entre deux navets, il parvient de temps en temps à participer à un bon film. Ce qui est chouette, c'est qu'il faut attendre de moins en moins longtemps avant qu'un bon ne sorte du lot. Faut dire qu'il a enfin avoué avoir fait pas mal de mauvais films ces dernières années (avec toutes ses dettes, je peux comprendre ses choix).

"The Trust" est un bon film de casse. Un peu à l'ancienne dans le sens où l'intrigue est minimaliste : on s'occupe uniquement du casse. Mais aussi de la relation entre les deux équipiers. Les auteurs jouent un peu de l'ironie dramatique : on sait des choses sur Stone qui influent notre jugement. Cela aurait pu être poussé plus loin, parce que son jeune équipier finit par nous rattraper alors qu'il aurait été sympa de nous laisser conserver notre avance. N'empêche que ce couple fonctionne très bien. On comprend leurs motivations et la caractérisation assez simple permet de ne pas se poser de questions. Bon, il y atout de même les accès de folie de Stone ; on se rend compte qu'il est un peu fou, qu'il est prêt à tuer (c'est là surtout que l'ironie dramatique marche le mieux). On comprend alors que ce type est au bout du rouleau malgré ce qu'il laisse penser, que ce casse, c'est vraiment tout pour lui.

Attention je vais spoiler ici.
Quand on le voit pointer son arme sur son collègue, on comprend qu'il ne veut pas tirer, qu'il éprouve une réelle amitié envers lui, qu'il ne compte pas le liquider par après. Malheureusement, son collègue, qui ne sait pas tout ce que l'on sait, ne se rend pas compte de cela et prend Stone pour un homme dangereux, le suspecte de le trahir. Il est certainement un peu désolé de découvrir les billets dans sa main à la fin...

Revenons à l'intrigue. On passe du temps à échafauder un plan, mais tout n'est pas dit. Ça c'est bien car ça évite la redondance. Ensuite on assiste au casse. C'est étiré. C'est savoureux parce qu'il n'y a pas de sous-intrigue (à part la relation entre les deux flics), on se focalise donc uniquement sur des obstacles directement liés au récit. Les résolutions sont bonnes, logiques, cohérentes.

Mais cette histoire ne serait pas si passionnante s'il n'y avait pas cette touche d'humour. Tout au long du film, on a droit à un côté délirant un peu discret. Quand le type s'enfuit de la maison au début alors que Stone parle à son chef, qu'aucun des deux ne le remarque, c'est hilarant. L'idée qu'il doive aller chercher un tracteur, c'est hilarant aussi. Le comportement imprévisible et maladroit de Stone (comme quand il laisse tomber son talki walkie par terre) est hilarant. Mais ce n'est jamais appuyé. Même quand Stone fait du Nic Cage, on sait que c'est censé être drôle, mais l'auteur n'en fait pas des caisses non plus.

D'ailleurs ça fait du bien de voir Nic dans un rôle taillé à sa mesure. Parce que bon, jouer le mec calme, le monsieur tout-le-monde, ça ne prend absolument pas. Ce qu'il lui faut, ce sont des personnages un peu fous. Et celui-ci l'est assurément. Il est impérial dans ce rôle. Sa démesure est parfaite. Et répond parfaitement à Elijah Wood. J'étais un peu réticent à ce duo et finalement je suis complètement sous le charme, la paire fonctionne très bien. Les autres acteurs, que 'on aperçoit peu, sont très bien aussi.

La mise en scène est bonne. J'aime beaucoup l'ambiance. La musique décalée du générique annonce la couleur. Ce qui m'a surpris, c'est le travail sur la lumière ; on a en effet droit à de belles ambiances électriques là où je m'attendais à quelque chose de plus passe-partout. Le découpage fonctionne bien aussi. Bon quelques ratés, comme quand nos héros se parlent dehors sur un terrain de basket je crois mais je ne suis pas sûr : les plans rapprochés sont bons, mais les plans éloignés sont du grand n'importe quoi (on filme au travers de grillages comme s'ils étaient observés).

Les réalisateurs parviennent vraiment à amener des choses. Le moment où on découvre la salle des coffres, c'est un peu magique, inattendu. C'est simple, c'est efficace. Et ça contraste très bien avec les 30 minutes qui précèdent dans la crasse et la poussière. À ce moment, j'ai cru les auteurs capables d'emprunter le chemin de la science fiction.

J'aime beaucoup l'idée qu'on ne sache pas tout. Tenter d'expliquer tout à la fin n'aurait fait que mettre en évidence les faiblesses narratives. En jouant à fond la carte du mystère, ça permet de donner de l'importance aux méchants. Et puis surtout de renforcer les surprises déjà présentées : les personnages ne savent pas ce qu'ils cambriolent ni qui. C'est sans doute là la grande originalité du film. Le fait qu'on ne réponde pas à toutes les questions, c'est quand même couillu.

Bref, j'ai passé un très bon moment devant ce film. L'intrigue m'a plu, j'ai beaucoup ri, Nic Cage est génial, son personnage est haut en couleurs.