Ambrose est vieux, aveugle et s’est affairé depuis des années à se constituer un bon gros caractère de merde, le rendant très enclin à renâcler sur son prochain et à se fondre dans un mutisme de marbre. Et c’est au milieu du marbre justement, forêt de croix dans l’attente d’une adoption, que le film s’ouvre, proposant d’emblée le parfum cynique qui embaumera la majeure partie d’un métrage aux doux relents d’un savoir faire hélas assez ancien.


Un croulant à la place de la grappe habituelle d'ados braillards. Un homme seul et solitaire, perdu dans des ténèbres constantes et aussi peu sensible à la lumière du soleil qu’aux rais blafards d’une lune timide qui se dirige vers sa nouvelle terre d’asile, lotissement de retraités, sorte de radeau de la méduse faussement accueillant. C’est en ce lieu balafré de rictus hypocrites que l’aveugle sentira de ses propres narines l’impensable, témoin de l’attaque d’une créature hirsute et gigantesque au fort penchant pour la chair et le sang. Va expliquer ça toi. Au milieu d’un tumulte agité, l’homme au fond d’un gouffre n’entend que bribes de mots, “pleine lune”, “régulièrement tous les mois”, “animal sauvage” et le solitaire se pare d’un drap de folie, errant pelle à la main au milieu d’une mer de chiffres et d’odeurs, comptant ses pas et flairant ses proies. Père-grand se prépare, il a un mois avant le retour du grand méchant loup.


Ne vous fiez pas à la moyenne rachitique du film ici bas, il n’en est rien. J’ai pour habitude d’être généreux avec les bonnes grosses merdes qui éclosent régulièrement dans les limbes du monde des images qui bougent, mais là c’est loin d’être la cas.
C’est dans ces petits films à peine entraperçus du grand public que la série B qui bave peut aujourd’hui espérer trouver un embryon de salut. Le film n’apporte pas grand chose de neuf mais le fait bien, puisant une inspiration louable dans certains des rois du genre, reprenant quelques facettes du lycanthrope dissimulé dans une communauté anxiogène à la manière d’un certain Joe Dante qu’on retrouve ici jusque dans le design des gueules à longues oreilles arborées par les gros toutous. L’histoire est d’une simplicité toute tracée, s’offrant dans toute sa prévisibilité mais reste portée par un savoir faire amoureux, tout de latex, d’effets mécaniques et de peluche parsemé. Un rythme qui sait se poser, une ambiance sonore enivrante… C’est une réelle surprise que de tomber aujourd’hui sur du film de lycan aussi soigné et prenant, baignant avec allégresse dans une amertume grincheuse dépassant de loin son strict sujet.


Cumulant autant de sentiers défoncés et éculés que de surprenante originalité, c’est dans son sérieux général que Late Phases se démarque vraiment. Il faut avoir des putain de couilles pour oser sortir un film de loup-garou sérieux aujourd’hui, nous dispensant de la sempiternelle ambiance comédie-horrifique qui ne trouve que sa propre queue à mordre depuis quelques temps. C’est avec un acteur principal honorable et une atmosphère des plus captivantes que ce film parvient à ne pas sombrer dans l’immondice sans recul et ose affronter son sujet simplement mais putain d’efficacement. Bravo. Et j’aime quand un homme affronte un loup-garou avec une poêle.

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le 25 juil. 2015

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zombiraptor

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