Les quarante kilomètres autour d’un camp de concentration, les nazis l’appelaient La zone d’intérêt. Le film de Jonathan Glazer raconte l’intimité de la famille de Rudolf Höss, Obersturmbannführer, lieutenant-colonel nazi, commandant du camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz-Birkenau de 1940 à 1943. Pour rappel, la solution finale fut mise au point à Auschwitz-Birkenau.
Glaçant
Cette famille nous ressemble, avec son bonheur petit-bourgeois. Pourtant, Jonathan Glazer réussit, par son procédé cinématographique, à ce que jamais, on oublie que ce sont des bourreaux. Il filme la dissociation, le déni de la réalité mais jamais l’inconscience. Aussi bien Rudolf que sa femme, que la mère, que les enfants, les amies, les bonnes savent ce qui se passe derrière le mur. Les tremblements de la jeune bonne, l’ivresse de la nourrice, la fuite de la mère, etc. en sont les preuves. Le réalisateur glisse des indices pour illustrer la banalité du mal décrit par Hannah Arrendt.
C’est glaçant ! Seulement, Jonathan Glazer permet des respirations avec notamment la petite fille résistante, finaude, qui ressemble à la Greta du conte d’Andersen.
L’interprétation de Sandra Hüller est vertigineuse. Elle donne à son personnage une illustration de cette cruauté, de la banale cruauté, assumée complètement et même revendiquée. Celle de Rudolf est encore plus dérangeante. L’acteur l’interprète froid et besogneux, absolument sans affect. Mais son port, sa cigarette fumée devant le camp, les saluts qu’on lui présente, tout lui procure la jouissance de sa cruauté à faire ce qu’on attend de lui…alors qu’il est un père attentif avec ses filles. Jusqu’à sa voix, étrange, qui étonne au début puis qu’on oublie. (Rudolf Hoss avait une voix de fausset dont on se moquait derrière son dos).
Ainsi, ce film La zone d’intérêt marque la décennie car pour la première fois, on y montre l’univers intime des nazis sans en occulter l’ignominie. Jonathan Glazer a supprimé notre voyeurisme mais ne nous laisse pas absents de réflexions. Car, ils nous ressemblent. Prenons garde de faire tomber le collectif dans l’ignominie !
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