C’est le premier véritable film de cinéma d’Helena Klotz ou, en tout cas, son premier long-métrage puisque le précédent sorti il y a plus de dix ans, « L’âge atomique », était plus expérimental et prenait plutôt le format d’un moyen-métrage. En effet, il ne durait qu’une heure et quelques minutes. À la vision de cette nouvelle proposition, on peut aisément assurer qu’elle creuse une voix singulière dans le paysage cinématographique français et qu’on attend la suite de ces travaux avec impatience et curiosité. Mais, surtout, elle parvient le tour de force de nous livrer un film éminemment contemporain et moderne sur tous les versants qu’il investit et emballé sous une couche de vernis cristallisant certaines de nos modes actuelles. Le film propose d’ailleurs enfin une œuvre s’inspirant de l’idéologie woke mais dans le bon sens du terme, où les idées de cette doctrine ne sont pas martelées n’importe comment. Cela se caractérise par le biais du personnage principal qui s’identifie comme neutre et non genrée. Un peu comme « La Vénus d’argent » au final qui passe d’un genre à l’autre avec grâce et fluidité sans en embrasser véritablement aucun.
Les interprètes musicaux qui passent à l’acting, chose plus commune que l’inverse, sont devenus monnaie courante. Certains embrassant même une carrière cinématographique digne d’intérêt comme, par exemple, Benjamin Biolay. La chanteuse Pomme, de son vrai nom Claire Pommet, trouve là un premier rôle de grande envergure et s’y glisse avec une maestria incontestable. Elle est le cœur vibrant de ce portrait de (jeune) femme qui est couplé à un récit d’apprentissage. Naturelle, revêche, versatile et étonnante, elle impressionne et donne envie d’en voir plus. Les seconds rôles ne sont pas en reste avec un casting brillant et inattendu où Klotz semble avoir choisi une galerie de comédiens bien racés : un habitué du sérail indépendant en la personne de Grégoire Colin, un jeune acteur québécois qui monte avec Niels Schneider, une future révélation issue de la diversité avec Sofiane Zermani vu récemment dans le très beau « Avant que les flammes ne s’éteignent » et, enfin, Anna Mouglalis et son timbre de voix si singulier. Un ensemble détonnant mais évident. Même dans les figurants on retrouve des faciès peu communs, prônant une diversité et une singularité physique peu courantes au cinéma.
On pensait que « La Vénus d’argent » allait prendre place dans le milieu de la finance uniquement mais on se rend vite compte que ce n’est pas le sujet du film, juste l’un de ses décors. Et concernant ce contexte, il faut avouer qu’il est ici bien vu et bien senti. D’autant plus que le personnage principal, quelque peu novateur et inédit dans un tel contexte, dénote admirablement. Tout comme son cadre familial d’ailleurs puisqu’elle vit au sein d’une caserne de gendarmes avec son père et ses frères et sœurs. La mise en scène de Klotz est froide, à la fois précise et minérale ainsi que magnifiée par une photographie bleutée du meilleur effet. Cela donne un cachet rare à cette proposition envoûtante, bercée par les notes d’une musique électronique du meilleur goût. Si la partie romantique avec Schneider convainc un peu moins, on suit les pérégrinations de cet électron libre fait personnage avec passion. Sa volonté, ses errances et ses hésitations nous poussent à nous attacher à elle et on en redemanderait presque surtout que l’excellente scène finale conclut ce récit en beauté, une découverte!
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