On ne possède pas la nature mais on peut l'influencer fortement. Le 26 avril 1986, les gens de Pripiat chantent et dansent à l'occasion du mariage d'Anya et Piotr. La nostalgie et l'innocence baignent ces images contemplatives qui annoncent paradoxalement une sorte de danger : des animaux morts, une pluie menaçante ou un ciel inquiétant viennent appuyer cette angoisse. Le lendemain, la femme apprend que son mari est mort et les populations doivent être évacuées au plus vite. Nous sommes à quelques kilomètres de Tchernobyl et l'un des réacteurs vient d'exploser.

Dix ans plus tard, nous retrouvons Anya devenue guide touristique dans la zone radioactive. Depuis l'incident, le temps pour elle s'est arrêtée. Hésitant en permanence entre son passé avec cette ville où elle a grandi et son premier amour qui a disparu, et un futur qui lui ouvre les bras mais qu'elle craint plus que tout, Anya n'arrive pas à se décider. Le récit adopte la même attitude en évoluant très lentement et ayant de nombreux passages répétitifs, avec des scènes de guide notamment trop longues.

L'image est devenue terne, sans couleurs, avec le bruit de cette pluie qui n'arrête pas de tomber. Dans ce décor sans vie, un fils tente désespérément de chercher son père qu'il croit toujours vivant. Cette catastrophe n'a pas seulement provoqué des dégâts physiques. On voit la détresse de ces « rescapés » qui n'arrivent plus à avancer et à croire en une vie meilleure. Sous cette musique mélancolique assez agaçante, l'espoir se fait mince pour ces individus torturés.

Enfin, on se rend compte qu'on parle très peu du déclenchement de la catastrophe, où beaucoup de non-dits sont présents. La population ukrainienne ne sait pas grand chose (image du paysan affirmant que la radioactivité ne se sent pas ni ne se voit) et l'Etat fait bien évidemment tout pour cacher ce désastre nucléaire. À cause de la folie des hommes, des milliers de vies ont été détruites à court ou long terme, et ce film leur rend hommage.
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le 8 févr. 2014

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Hugo Harnois

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