Parfois il suffit de peu de choses, d'une petite intrigue - un individu au passé inconnu s'échappe d'une prison - pour pouvoir véhiculer un grand nombre de messages et peindre tout un pan de la société américaine.

Bobby (prononcez-le à l'américaine) s'échappe de prison, et c'est tout une ville qui s'emballe et qui terminera en flammes (littéralement).

Mais qu'a donc fait ce sacré Bobby ? Pourquoi tant hostilités pour certains, tant d'espérance ou d'inquiétudes pour d'autres à l'égard de cette nouvelle ?
Finalement, il n'y aura pas vraiment de réponse à ces interrogations, puisque Bobby ne sera porté qu'au second plan par le scénariste du film, Il ne servira que de prétexte au développement des personnages au fur et à mesure du film. Et ce sont toutes les classes qui en prendront pour leur grade : le riche capitaliste véreux fana d'argent sale, prêt à dégainer sa liasse de billets pour acheter son innocence, le délinquant non pas pauvre contrairement aux idées reçues mais celui en col blanc, la femme à fric, la femme décadente, le shérif impuissant, etc...

En parlant de sheriff impuissant, j'ose faire un parallèle plus ou moins proche avec No Country For Old Men, réalisé plus de 30 ans plus tard par les frères Coen, mais qui me parait très proche au niveau des multiples thématiques abordées. Notamment : la chute de l'empire américain vue aux travers du sherif Calder incarné par le grand Marlon Brando (ou Tommy Lee Jones chez les Coen) . Impuissant face à la nouvelle délinquance, face au racisme et à la corruption qui pourrit toute la ville.

Pour avoir vu Bonnie and Clyde du même réalisateur, je l'ai trouvé ce dernier limite très gentillet par rapport à celui-ci. Disons que B&C ne m'avait pas bouleversé non plus, peut-être à cause d'avoir bouffé jusqu'à l'overdose de films de mafieux... mais là je trouve que l'oeuvre est encore plus forte, encore plus dénonciatrice, car elle englobe une bonne partie de la société moderne américaine.

On ne partage peut-être pas totalement le pessimisme manifeste d'Arthur Penn à l'égard de son pays (notamment la caricature qu'il fait de la révolution sexuelle et sa répulsion de l'argent), mais derrière ce titre nanardesque se cache une oeuvre assumée, puissante et très sombre dans son propos.
jejeninjaki
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le 6 mai 2013

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