Entre un "Conjuring 3" jugé pas à la hauteur de ses prédécesseurs et un "La Malédiction de la Dame Blanche" tout bonnement insipide, le Conjuring-verse en était resté à un point aussi mort que les esprits malveillants qu'il met en scène. Certes, la qualité des longs-métrages de cet univers était déjà on ne peut plus fluctuante, notamment du côté de ses spin-offs à base de poupée et de nonne, mais, si on devait trouver un dénominateur commun aux faiblesses de ses dernières composantes, ce serait le nom de Michael Chaves qui viendrait immédiatement à l'esprit.


Pas à la hauteur de James Wan au niveau de la mise en scène d'un "Conjuring", clairement pas convaincant non plus lorsqu'il s'agit de se démarquer à la tête de son propre spin-off sur la Llorona, l'omniprésence récente de ce réalisateur au sein de ces films tient d'un mystère surnaturel que les époux Warren ne sauraient eux-mêmes résoudre tant le bonhomme ne semble pas être en mesure d'y apporter la moindre once de folie. Dans la continuité de cet élan kamikaze inexplicable (enfin si, le Conjuring-verse continue de cartonner au box-office, quelle que soit la valeur des films), c'est encore lui que l'on retrouve aujourd'hui à la tête de la suite d'un des plus mauvais spin-offs de la marque: "La Nonne: La Malédiction de Sainte-Lucie".

Et, si le premier opus avait au moins un petit style gothique (inspiré de la Hammer d'antan) insufflé par la patte de Corin Hardy pour limiter un minimum la casse sur la vacuité ahurissante de... bah... à peu près tout le reste, on ne voyait pas trop quelle eau bénite de renouveau pouvait apporter un metteur en scène aussi peu inspiré que Michael Chaves afin de redorer le voile de ce pauvre Valak.


En dépit de nos prières pour que nos a priori à son égard se transforment en louanges divines, "La Nonne 2" ne fait hélas que transformer ces doutes en certitudes. Non pas que le film se pose en pire représentant de cet univers ("Annabelle" premier du nom nous aura définitivement laissé avec les mêmes yeux vides que sa poupée) mais il en condense une nouvelle fois les pires tares.


À commencer par le fait que ce démon ayant simplement pris l'apparence d'une nonne pour maximiser son capital blasphématoire n'est toujours... qu'un vulgaire démon, comme ceux que l'on croise à la pelle depuis des dizaines d'années sur grand écran !

Au-delà de son introduction dans "Conjuring 2" qui avait su tirer profit de sa seule silhouette inquiétante et alors que le premier film avait déjà eu un mal fou à broder un semblant de background original pour élever son entité au-dessus de ses concurrents, ce deuxième opus enterre toute tentative d'y parvenir, se reposant uniquement sur les vaines conséquences de son prédécesseur (un Maurice/Frenchie pas net depuis un viol buccal reptilien en Roumanie... tout est vrai dans ces mots) pour répéter un énième cycle/empilement d'apparitions maléfiques complètement gratuites, attirant sans cesse des personnages aux visages connus ou nouveaux dans les recoins les plus sombres des lieux visités pour des "boo-ouh !" qui peinent à produire leurs fruits.

Partagé entre une logique de bis repetita (une deuxième enquête en mode ecclésiastique, encore une sœur en plein doute sur sa foi, une course "DaVinciCodienne" à l'artefact improbable, des résolutions en forme de miracles fumeux) et quelques tendances à s'inspirer d'un "Annabelle 2" pour diversifier les apparences de Valak sur la base de peurs propres à ses protagonistes, "La Nonne 2" donne surtout le sentiment d'un film gesticulant perpétuellement dans le vide, gâchant même les rares bonnes idées de manifestations de sa nonne (le kiosque, l'enfant) par les effets fatigués qui s'y associent sur leur durée trop étirée.


Même s'ils n'atteignent pas le lugubre de la précédente aventure roumaine, on retiendra néanmoins les décors du sud de la France des années 50 (et, plus particulièrement, celui d'une école religieuse où Valak a élu domicile) comme une des rares réussites du film, d'autant plus que son tournage a eu lieu en partie à Aix-en-Provence pour plus d'authenticité, permettant à "La Nonne 2" de faire de ses cadres cléricaux séculaires et ténébreux le seul grand apport de son entité à l'intérieur du "Conjuring-verse".

Mais, à part cet apparat de contexte, l'errance jumpscarisante de Valak à travers "La Nonne 2" sera bel et bien aussi enthousiasmante que la dégustation d'hosties d'une fin de messe interminable.


Le pire étant sans doute son final grotesque, incapable d'apporter un sens aux objectifs poursuivis par le démon (il est déjà surpuissant dès les premiers instants du film alors à quoi bon faire tout ce qu'il fait, punaise ?), d'offrir un véritable spectacle digne de ce nom pour pousser au paroxysme l'ampleur de sa menace ou de nous convaincre des coïncidences nébuleuses qui tombent sur la tête de ses héroïnes comme des portes de sortie très opportunes à toute cette histoire.

Et, comme une preuve ultime du sale état dans lequel le "Conjuring-verse" se trouve à l'heure actuelle, la scène post-générique censée nous faire implorer le Ciel de l'arrivée imminente d'un "Conjuring 4" (déjà acté) aura autant d'effet qu'un pet de nonne perdu dans la cohue d'une dimension infernale. Ici devrait s'arrêter l'histoire de cette nonne. Vraiment.

RedArrow
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le 20 sept. 2023

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