Petit film d'épouvante US surgi d'un peu nulle part dans la programmation estivale 2023 des salles françaises, on ne peut pas dire que "La Maison du Mal" soit la bâtisse hantée qui suscite a priori les plus grands désirs de visite au cinéma, hormis peut-être la sympathie que l'on peut avoir pour certains de ses occupants bien connus du petit écran (Lizzy Caplan, Anthony Starr, Cleopatra Coleman).

Pourtant, à bien y regarder, les plus férus du genre y reconnaîtront également le nom à la réalisation du frenchie Samuel Bodin, le créateur de la série "Marianne", une des rares percées hexagonales dans l'épouvante sous ce format et qui, il faut reconnaître, donnait envie de voir ce que le bonhomme pouvait nous réserver à l'avenir (on le sait, la série avait clivé par son ton mais, nous, on avait plutôt aimé la proposition).


Le Français revient donc aujourd'hui avec son premier long-métrage, américain de surcroît, en nous plongeant dans le quotidien de Peter, un petit garçon qui, un beau jour, se met à entendre des bruits étranges à l'intérieur d'un des murs de sa chambre...

D'emblée, Samuel Bodin confirme tout le bien que l'on pensait de lui en termes de visuel et d'atmosphère instaurés dans la plus pure tradition des canons américains du film d'épouvante. L'amour du cinéaste pour le genre transpire en effet de l'écran à chaque recoin des fondations de sa "Maison du Mal" et, plus particulièrement, pour créer un climat que l'on devine rapidement malsain derrière les murs cloisonnant l'existence de Peter.

Entre ces "bruits" qui se mettent à perturber méchamment le petit garçon, sa vie d'élève chahuté et des parents passés maîtres dans l'art de produire les têtes les plus louches du monde (Lizzy "Annie Wilkes" Caplan et Anthony "Homelander" Starr ont clairement été choisis pour ça), quelque chose ne tourne définitivement pas rond dans la maisonnée et la grande question va être d'en deviner la nature...


Malheureusement, à trop vouloir jouer avec les apparences pour chercher à nous détourner le regard de ce qui s'y trame réellement, "La Maison du Mal" va très vite se résumer à un armada de séquences clichées se nourrissant de tous les stéréotypes possibles d'une intrigue type d'enfant tourmenté dans ce contexte.

Épuisante par les situations et figures caricaturales qu'elle ne cesse d'invoquer (la t.très gentille institutrice ou le t.très méchant bourreau de Peter à l'école notamment), l'écriture semble s'absoudre de toute subtilité pour imposer les personnages gravitant dans la sphère de Peter jusqu'à transformer la plupart de leurs interactions en moments de plus en plus involontairement drôles, où des dialogues gênants se mettent à répondre à l'indigence de développements les concernant et donnent même au long-métrage des airs de surréalisme absurde le balayant hors du champ de la crédibilité.

Et, alors que l'entretien de ce brouillard autour des "sons" du mur nous afflige plus qu'il nous passionne, Samuel Bodin nous frustre sans le vouloir en étant capable de produire quelques vrais bons moments de flippe (une séquence cauchemardesque très réussie par exemple) dans un film qui ne paraît jamais être à la hauteur de ces rares instants.


Quand vient le temps de briser le mur de mirages pour montrer ce qu'il s'y cache, "La Maison du Mal" ne peut pas se targuer de la révélation la plus originale qu'il soit (elle est même assez prévisible) mais il faut reconnaître que son réalisateur va plutôt bien s'amuser -et nous amuser avec- en orchestrant un dernier acte aussi opportuniste que gratuit en vue de déchaîner enfin pleinement le mal au sein de la demeure.

C'est d'ailleurs peut-être là que la filiation du film avec "Marianne" est la plus criante: la générosité d'effets et un certain brio pour mettre en scène la fureur de son antagoniste sont bien les mêmes que ceux qui gouvernaient les meilleurs moments de la série et qui, ici, produisent un climax plutôt fun dans l'action, assez malin pour jouer avec les spécificités de son entité et nous maintenir en haleine à chaque fois que celle-ci apparaît.

Certes, ce déploiement final et soudain d'énergie franchement divertissante ne suffira pas à rendre l'ensemble aussi mémorable que sa "chose" le laisse entendre durant les derniers instants du long-métrage mais, sans éluder les importantes fautes de parcours nous y ayant conduit, ce sera néanmoins suffisant pour continuer de nous intéresser à la suite du parcours de Samuel Bodin.

Le cinéaste français a clairement du potentiel, vivement un prochain film qui ne nous le laisse pas qu'entrevoir.

RedArrow
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le 20 juil. 2023

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