La la Land est un bel objet coloré, anachroniquement acidulé, mais construit sur des piliers de meringue.


Ici la relation amoureuse n'est que tremplin à une réussite, un accomplissement personnel qui suinte l'individualisme forcené de notre temps.
En effet, pas de finalité aux sentiments : ils ne sont qu'endorphine passagère, jouissances éphémères et jamais n'aboutissent à une quelconque concrétisation.
Les personnages ne créent rien de connivence : ils ne partagent rien (un nom de bar ? brièvement, asynchroniquement un toit ?) et leurs conversations sont angoissantes de vide, centrées uniquement sur leurs objectifs privés. La construction de l'idylle cartonnée se heurte aux dialogues, alors même que l'alchimie esthétique nous transcende.


Le rêve exclut autrui, forcément incompatible avec notre petit objectif. Car ici il n'est pas question de changer le monde, juste avoir le café gratuit et le poulet jazzy. Il est ici intéressant de faire le parallèle à Whiplash et à l'égocentrisme de son héros, une vraie marotte chez Chazelle chez qui on décèle une sorte d'auto mise en scène.
Quel est le prix de la "réussite" ?
Le matériel (un bar, un château, son visage greffé aux boulevards), étendard de l'accomplissement personnel, écrase les perceptions et sentiments, se désire au point de se détruire soi même.


Le "je t'aime" perd son essence lorsque qu'utilisé avec toujours, il est violé huit mois après. La distance fait mourir le feu et le la notion de patience disparait : tout va vite, la vie est trop courte pour se permettre une latence.
Epicurisme digital ? Individualisme pyromane ? Tout brûler derrière soi pour avancer.


La complaisance dans un sentimentalisme sans fond, faussement tragique, car solutionnable nous absout de l'action, cautionne nos lâchetés tout en retournant l'estomac des adversaires du fatalisme.


Nous ne sommes que des êtres interchangeables, l'amour n'est finalement qu'un moyen de réaliser nos desseins, le moi passe avant le nous et seul importe d'atteindre le prochain checkpoint. Mais restez tranquille la musique est sympa.

Wonderland
4
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le 2 mai 2017

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Wonderland

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