Lovecraft au cinéma, ça sera encore pour une prochaine fois...

Adapter du Lovecraft à l'écran doit avoir un goût plus qu'excitant avec l'ère des effets spéciaux moderne pour les auteurs et les studios d'aujourd'hui tellement cet univers offre un visuel organique passionnant. C'est un imaginaire sensoriel unique qui n'a presque aucune comparaison possible car lire du Lovecraft, c'est mystique, insidieux, cosmique tout en subissant une lente et obscure descente dans les ténèbres les plus obscure. C'est même peu être même, parmi les lectures éprouvantes, une dès plus difficile qu'il m'ai été donné de lire malgré le fait qu'elle soit à chaque fois passionnante. Essayez d’enchaîner les nouvelles de Lovecraft, c'est comme faire Silent Hill sur playstation seul, de nuit, isolé au milieu de la campagne dans une maison de campagne. Sauf que Lovecraft fait ça même dans le métro, c'est dire... En général dans ses histoires nous suivons un seul personnage ordinaire, confronté à un abîme qui le dépasse et c'est absolument passionnant à découvrir, doté d'une ambiance subtile et terrifiante. Il y a un côté hypnotique, fascinant et malsains à vouloir savoir ce qui ce cache derrière l’abîme de chaque récit.

Bref dans les mains d'un génie cinématographique comme Darren Aronofsky par exemple qui serait je pense, de très loin le meilleur choix possible si l'on souhaite un jour connaître une véritable adaptation à la hauteur du matériel d'origine, on vivrait un moment de cinéma totalement unique. Mais trêve de fantasme, ici il faudra ce contenter de Richard Stanley et il suffit de regarder sa filmographie pour ce rendre compte que l'on est très loin du compte même si oui, il faut bien le reconnaître, il fait ici mieux que d'habitude et offre même quelques petits moments réussi comme le découpage des carottes, la découverte des lamas, ou encore de la mère et du jeune fils très "The Thing" de Carpenter (la référence est presque évidente à la vision de la police du générique).

Le réalisateur cherche par moment à re-créer une ambiance presque naturaliste avec un certain respect du matériel d'origine, illustré notamment par des gros plans ici et là d'une nature inquiétante, insidieuse et mystérieuse, particulièrement au début du récit mais ça ne sera pas suffisant et ceux pour plusieurs raisons. Déjà Lars Van trier avec son magnifique Anti-christ réussi bien mieux ce genre d'exercice et surtout, très vite, voir dès les premières minutes apparaissent déjà un manque terrible de subtilité pour un récit de ce calibre et cela ne vas pas s'arranger. Très vite tout sera noyé avec un excès sonore et visuel introduisant la menace d'une manière fort peu adroite. Alors en vérité sur le papier, l'idée n'est pas idiote en soit, car elle participe à faire vivre une saturation des sens à l'image des personnages dans le récit, mais tout miser la dessus jusqu'à l'excès total c'est fort dommage voir réducteur, rendant rapidement le tout bien trop simpliste.

Après la vision du film, il ne fait presque aucun doute que nous sommes devant une tentative opportuniste de surfer sur le retour de grand Nicolas Cage et de comprendre qu'avec le film Mandy (d’ailleurs il aurait du essayer avec son réalisateur quand j’y pense) il y a bien quelque chose à tenter dans l'ambiance et le visuel pour ce récit (donc autant en reprendre la star au passage) et puis Lovecraft aujourd'hui, c'est un auteur bien plus reconnu de tous alors... En avant pour l'adaptation avec quelques changement de taille dont les personnages principaux, pour une meilleur identification des spectateurs lambda avec sa famille moderne d'anciens citadins en reconversion dans la campagne pour plus de simplicité (exit la famille de fermiers crasseux de la nouvelle originale) et puis tant qu'a faire, voici quelques nouveaux personnages pour ajouter un peu de piment et d'explication à voix haute. En soit ça peu être une bonne idée de l'actualiser, mais fallait-il en faire des clichés à tous les étages et puis en terme de "sens" ce n'est pas terrible comme message (du genre si vous revenez à la nature, vous allez en mourir) mais bon, passons, essayons d'y croire.

Même en plissant les yeux au mieux, le film rate pourtant complètement le coche, oubliant la retranscription d'un vrai dégradé de cette plongé dans l’abîme coloré et tout vas bien trop vite devenant toujours plus grossier et caricatural. Que ce soit avec les personnages, leur obsessions, le visuel, la nature et bien sûr, la couleur. On ce rends vite compte que l'on est simplement devant un film d'horreur classique, certes, parfois un peu mieux que la moyenne car l'univers qu'il adapte est génial, mais clairement tous y est très décevant quand on connaît l'original.

Alors si l'on en fait abstraction de la nouvelle d'origine et qu'on essaye de prendre le film pour ce qu'il est, là encore on en retiendra pas grand chose à part le concept, ça se regarde quand même et on passe un bon moment, mais rien n'est vraiment prenant, à part peu être quelques scènes qui marquerons bien les esprits de part sa puissance visuelle de l'horreur organique mais qui s'avère au final peu transcendante tant le film cherche à éviter le malaise chez son spectateur (et qui est paradoxalement le moteur chez Lovecraft). En fait cette adaptation devient un bon petit film du samedi soir, quitte à perdre toute la saveur de l'univers. Difficile à digérer quand même, quand on sait que ça aurait pu être une expérience unique et incroyable, mais bon voilà il faudra s'y faire, Lovecraft au cinéma, ça sera encore pour une prochaine fois, peu être...

spikespiegel2
5
Écrit par

Créée

le 20 nov. 2023

Critique lue 1 fois

spikespiegel2

Écrit par

Critique lue 1 fois

D'autres avis sur La Couleur hors de l'espace

La Couleur hors de l'espace
guyness
5

Cage thoracique

Finalement, quoi de plus logique que la planète Nicolas Cage pénètre l'univers de H.P. Lovecraft ? On peut même se poser la question: comment la chose n'est pas arrivée avant ? Mais oui: Cage. Cage...

le 12 avr. 2020

46 j'aime

12

La Couleur hors de l'espace
B_Jérémy
8

Nous sommes présentés à la famille Gardner, bon séjour en enfer et que la folie vous guide

Qu'est-ce qu'on mange ? Un cassoulet ! Oh, non, qu'elle horreur ! C'est un plat traditionnel français. Oui, c'est un plat de bouseux tu veux dire. Jack, tu veux bien enlever le...

le 1 août 2022

35 j'aime

43

La Couleur hors de l'espace
Fatpooper
10

Vous allez chier du mauve

Nic Cage a la filmo bien remplie depuis quelques années, grâce à toutes ces séries B qu'il accepte de faire avec de jeunes réalisateurs. Faut pas croire qu'il ne fait que de la merde, régulièrement...

le 26 févr. 2020

20 j'aime

6

Du même critique

Le Journal d'une femme de chambre
spikespiegel2
8

Un grand classique d'une efficacité rare

Délicieuse critique de la France opportuniste et rance de nos campagnes d'autrefois, le film est porté par une Jeanne Moreau magnétique. Et l'on peu dire qu'elle ni rose, ni idéale cette campagne...

le 6 janv. 2024

1 j'aime

Super Z
spikespiegel2
6

L’anti-thèse du film de zombies classique

Super Z est pour ainsi dire l’anti-thèse du film de zombies classique, profondément potache et délirant, j'étais complètement passé à côté de cet ovni trash français ! Après un début sympathique,...

le 20 nov. 2023

1 j'aime

Génération perdue
spikespiegel2
4

Génération Baby América

Samedi soir, un peu hypé par le titre avec sa petite réputation de film culte des années 80, j'ai enfin vu Génération perdu (The Lost Boys). C'est aussi le film qui a révélé notre cher Jack Bauer...

le 22 oct. 2023

1 j'aime