"La chambre ardente" est un des derniers films de Duvivier, tourné la même année que "le Diable et les 10 commandements". Mais autant ce dernier est une réussite, autant le film qui nous intéresse ici me pose question.


Le début est excellent. La mise en scène de tous les personnages est pleine de mystère et intrigante. Le lieu, l'image, la photographie, l'ambiance, tout en impose.
Le château au milieu de la Forêt Noire du vieux Matthiaz Desgrez, lointain descendant de l'amant de la fameuse empoisonneuse Marquise de Brinvilliers, qu'il a dénoncée et fait condamner.
Les neveux (Claude Rich et Jean-Claude Brialy) qui n'attendent que le vieux Desgrez casse sa pipe, un historien invité qui arrive avec sa femme (Edith Scob) qui n'est autre qu'une lointaine descendante de la Brinvilliers, un vieux médecin (Balpêtré) versé dans les sciences occultes qui traficote avec le vieux Desgrez, une infirmière charmante (Nadja Tiller) ...


Voilà une belle introduction au film avec des gens plus ou moins intéressés à la mort du vieux. L'attention s'avive quand le vieux finit par caner, empoisonné semble-t-il, ce qui n'étonne pas le spectateur du fait du contexte.
L'ouverture du testament précise, entre autres, les exigences du vieux en matière de funérailles : un bal au château avec orchestre et des valses viennoises autour de son cercueil suivi d'un départ avec une fanfare pour le conduire au tombeau situé dans le parc, dans une mise en scène très réussie. Tout ceci est original et tout-à-fait excellent. Le spectateur salive.


Et puis, et puis, l'action s'enlise comme si le scénario n'était plus très au point, des tas de pistes sont ouvertes. Aucune fermée. Le spectateur se rend bien compte que tout le monde a finalement intérêt à la mort du vieux. Apparaissent des liaisons entre les protagonistes qui épaississent encore un peu plus le mystère. L'action s'enlise et hésite entre un registre franchement fantastique ou prosaïquement policier. A la fin, un flic s'en mêle (excellent Claude Piéplu) mais tout reste dans l'entre deux. La fin bizarre laisse le spectateur (le rédacteur de cet avis, entre autres) sur sa faim.
Le film laisse le spectateur se débrouiller pour interpréter à sa guise qui sont le ou la ou les coupables ou peut-être, pourquoi pas, l'absence de coupable.


Le scénario est tiré d'un roman de John Dickson Carr, spécialiste, dit-on, des romans policiers où l'énigme est "en chambre close". L'idée de base est de démontrer que le meurtre est impossible. C'est un genre que je connais mal à part un roman de SF d'Asimov "Face aux feux du soleil" que j'avais lu et relu, qui m'avait intrigué mais guère passionné.


Les acteurs qui jouent dans ce film apportent avec talent leur dose d'ambigüité : Claude Rich en héritier écervelé et dépensier, Jean-Claude Brialy en héritier sérieux et respectueux, Balpêtré inquiétant, Nadja Tiller à qui on donnerait le bon dieu sans confession, etc ...
Nadja Tiller qui est d'origine allemande conserve généralement dans les films qu'elle tourne, un petit accent. Ici, alors que l'action se passe en Allemagne, la production l'a fait doubler pour lui ôter son accent. On se demande bien pourquoi à moins que ce soit un mystère de plus, à mettre à l'actif du film...


Ce film avait tout pour être excellent : le sujet, le lieu, les décors, l'ambiance, les acteurs ; malheureusement, l'ambigüité de la fin gâche un peu l'ensemble. Quel dommage !

JeanG55
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le 1 nov. 2021

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JeanG55

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