« Et comme film récent tu as vu quoi ? - Un Jean Gabin qui vient de sortir. »

Les films longtemps perdus et soudainement retrouvés sont souvent source d’excitation intense suivie de déception diffuse. Pour les plus jeunes, dites-vous que c’est comme un rendez-vous Tinder.


La Belle Marinière n’a été retrouvée qu’en partie, les bobines manquantes étant remplacées par des photographies de tournage commentées en voix off d’après le texte de la pièce de Marcel Achard dont le film est tiré. Ceux qui ont l’habitude de certaines filmographies antiques ne s’en offusqueront pas. D’autant que les bobines survivantes ont été très correctement restaurées.


La déception est là, bien tranquille, tant le film est mineur. Il s’agit d’un mélodrame français des années 30 as usual, avec deux copains, dont l'un se marie, avec bien entendu le seul caractère féminin possible de ces années-là, une semi-garce donc, et l’autre qui ne tardera pas à succomber aux charmes de la sus-décrite ; fin de l’amitié, le pardon sera-t-il possible, on s’en fiche un peu.


Il va de soi que l’intérêt d’un tel film réside ailleurs. Dans le cadre, déjà : un film se déroulant sur une péniche ne peut pas être foncièrement mauvais. Dans le casting, ensuite et bien sûr, même si en parlant de péniche on ne peut que regretter l’absence de Michel Simon et Dita Parlo. Mais enfin un Gabin vaut mieux que deux tu l’auras, sauf bien sûr pour ceux qui pensent qu’un bon acteur est celui qui passe pour une autruche sous prétexte qu’il se met une plume dans le derrière, ce qui n’est guère qu’un exploit de costumier.


On sera plus dubitatif sur Madeleine Renaud, un peu juste en presque vamp, et sur Pierre Blanchar, acteur irritant, mais auquel je commence tout de même à m’habituer, les Croix de bois n’y étant pas pour rien. La petite Rosine Deréan est en revanche tout à fait comestible, on comprend à peine pourquoi Jeannot ne part tout simplement pas avec elle. Le simple fait qu’elle soit sa sœur suffit-il à ce choix discutable ? Peut-être, mais cela n’excuse en rien le comportement du copain, qui ne peut se prévaloir d'une telle pudeur.


Anecdotique mais un peu charmant tout de même, donc, et de toute façon indispensable aux fétichistes de la vieille pellicule. D’ailleurs, si vous avez Four Devils sous le pied d’une armoire, n’hésitez pas à vous faire connaître.

Duan

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