En 1959, Edward Dmytryk réalise avec L’Homme aux colts d’or (Warlock), un western qui sans se hisser à la hauteur des chefs d’œuvre du genre détonne par l’originalité de son scénario et de ses personnages.


Une entrée en matière classique
Les premières scènes de L‘Homme aux colts d’or ressemblent à celles de nombreux westerns des années cinquante. Warlock, une petite bourgade comme tant d’autres, vit sous la domination d’un grand propriétaire terrien, Abe McQuown, dont les hommes de main imposent leur loi jusqu’au shérif lui-même. Lorsqu’un redresseur de torts, Clay Blaisedell (Henry Fonda) est appelé à la rescousse, on reste dans le schéma très classique de l’homme providentiel. Pareil côté décors : le saloon à droite, la prison en face et la grand rue au milieu achèvent de donner un sentiment de déjà vu. Quant à la réalisation de Dmytryk, bien que s’appuyant sur une belle photographie de Mac Donald, elle reste somme toute très littérale. Fort heureusement, le scénario porté par une galerie de personnages originaux confère au film toute sa singularité.


Un scénario à trois « bandes »
Signé Robert Aurthur et adapté du roman d’Oakkley Hall le scénario de Warlock – le titre original – rompt avec la linéarité propre à la plupart des westerns. Exit l’opposition binaire entre les bons et les méchants, L’Homme aux colts d’or se structure comme un billard à trois bandes opposant Blaisedell, l’homme de l’ordre (Henry Fonda), Bannon, l’homme de loi (Richard Widmark) et McQuown l’homme de pouvoir (Tom Drake). Et de fait, il va s’agir bien plus de confrontation psychologique entre les membres de ces trois clans que des gun figths annoncés par le titre, les fameux colts d'or brillant davantage par leur absence que pour leur usage. Parallèlement, le film noue deux intrigues amoureuses entre le marshall et une habitante (Dolorès Michaels) et entre le shérif et une Dorothy Malone vengeresse. Bref, un scénar plus kiss kiss que bang bang. Du moins jusqu’aux explications finales.


Des personnages atypiques
Si le marshall, mercenaire implacable, ange noir de la mort, incarné dans toute son ambiguïté par Henry Fonda, ne manque pas de surprendre, la véritable originalité du film réside dans le personnage de Tom Morgan. L’homme de confiance de Blaisedell avec lequel il partage l’élégance vestimentaire et la gâchette fatale, regarde la modernité en marche comme la pire des calamités. Figure ambivalente, à la fois beau parleur et infirme, il entretient avec son alter ego une relation fusionnelle que certains ont interprété comme pouvant être de nature homosexuelle. Un « couple » qui détonne dans l’univers du western, qui préfère en règle générale les lonesome cow-boys. Quant au duel fratricide qui les oppose, un des plus réussis du genre, il est à mettre au crédit de Dmytryk, de son sens du cadre et de la mise en scène.
De quoi lui tirer définitivement son chapeau...


Personnages/interprétation : 8/10
Réalisation/photo/musique : 7/10
Histoire/scénario : 8/10


8/10


Critique originale publiée sur le Mag du ciné

Theloma
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le 8 juin 2019

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