Un jour, faudrait songer à acheter un stabilisateur

Les doublons au cinéma sont à la fois rares et monnaie courante : il s'agit, pour ceux qui ne savent pas, de deux films sortis la même année avec un scénario presque identique. L'année 2018 vit ainsi deux long-métrages portant sur la possession démoniaque d'un cadavre à la morgue : le très bon The Autopsy of Jane Doe, et L'Exorcisme de Hannah Grace, plus direct, plus frontal, puisque sans aucun mystère ni tentative de dissimulation de l'identité de la possédée, dévoilée dès sa scène d'introduction grotesque.

La grande différence entre les deux tient surtout du manque de qualité flagrant de cette version au rabais, jamais inventive, jamais effrayante non plus : interprété n'importe comment, tenu par des acteurs sans présence ni crédibilité, il s'évertue à leur faire jouer l'effroi pour montrer la voie au spectateur; pas de bol, ça ne l'effraiera pas plus que tous les autres effets prévisibles et éventés, indignes d'un film d'épouvante sorti au cinéma (un .

Il faut dire que la réalisation de Diederik Van Rooijen, tentant de soigner ses plans fixes, ne sait ni composer de cadrages symétriques (qui aurait normalement participé à poser une atmosphère réussie) ni gérer sa caméra en mouvement : alors atteint de Parkinson, il la traîne dans tous les coins, la promène dans tous les angles en mimant le mouvement d'une balançoire aux trajectoires anarchiques.

La photographie ne l'aide pas non plus à poser une ambiance, toute laide et sans relief. A l'image de ces plans censés rythmer ses scènes de poursuite, d'une lenteur exécrable : l'on ne s'inquiète jamais de ce qui se passe à l'écran, tout comme on ne se sentira jamais vraiment impliqué au sujet du devenir de ses personnages stéréotypés, qui remplissent à peu près tous les critères attendus pour construire les protagonistes habituels du genre horrifique.

Stupide, perturbée par un passif qui la torture et qu'elle souhaiterait vaincre, Megan Reed (interprétée par Shay Mitchell) accumule tous les critères de l'héroïne de film d'horreur sans autre personnalité que celle que lui accorde son passé. Sauf qu'elle n'est jamais crédible en ancien flic tentant de surpasser sa toxicomanie : beaucoup trop lisse, sans autre relief que le joli aspect de ses cheveux, elle campe un personnage trop ambigu pour sa personnalité plate.

Allez donc vous attacher à ce genre de personnages quand le scénario ne fait que proposer une suite de scènes prévisibles, rassemblées dans une intrigue sans surprise non plus, qui n'a plus d'imagination une fois arrivé le moment de conclure : on y déniche alors une mince tentative de fin ouverte, aux vues de la simplicité en pétard mouillé de son affrontement final ridicule (la caméra, lassée d'être trimballée de part en part du décors, floute l'image pour qu'on n'y comprenne plus rien).