On continue le cycle Arte dédié à l'oeuvre de Costa-Gavras avec L'Aveu, inspiré des Procès de Prague, et dont l'affiche a de quoi intriguer...
Et même si au final cette paire de lunettes noires aveuglantes ne représente qu'un détail de la détention du personnage principal, il faut bien avouer qu'elles font leur petit effet... Yves Montand donc, dans un rôle où il aura probablement dû concéder quelques kilos, incarne magistralement un responsable politique tchécoslovaque d'abord enlevé, déshabillé, menotté, puis emprisonné par son propre (façon de parler) parti : le Parti Communiste Tchécoslovaque de l'ère stalinienne d'après-guerre, dans lequel même sa femme (Simone Signoret) semble très impliquée, lui vouant un culte comme d'autres vouent un culte à leur religion...
Pendant le temps de son incarcération, le domicile de ce fils d'ancien prisonnier politique communiste et de sa femme se retrouve perquisitionné en présence de leurs enfants d'une manière peu courtoise : "Vous vous conduisez comme les nazis !" lancera la maîtresse de maison, pendant que son mari, dans sa cellule où des cris torturés se font entendre, sera forcé de marcher en continu, comme de s'endormir en position dorsale sur une planche de bois, régulièrement réveillé par les gardiens. Mais alors pourquoi ? Lui-même ne le sait pas, à part qu'on lui demande d'avouer ses crimes vis-à-vis du Parti, mais sa réponse sera toujours la même : "Avouer quoi ?"
Très vite on apprendra son judaïsme, et que quand même, pour qu'il soit encore en vie malgré son arrestation par la Gestapo à l'époque, c'est très suspect... On l'accusera aussi de Trotskisme, et de collaboration avec l'ennemi américain. Mais on comprendra finalement que le Parti veut se servir d'un procès public d'une dizaine de ses membres afin de légitimer ses échecs économiques et sociaux. Alors une longue épreuve d'interrogatoires pernicieux de réécriture de la vérité, de signatures de faux aveux, via une torture du temps qui passe et qui sape les corps comme les esprits rythmera les 3/4 du film. Le comble étant que l'interrogateur principal s'avèrera être un ancien interrogateur nazi... Vive la politique ! Vivent les salopards aux vestes retournées !
Et pour le coup, cette partie aurait peut-être gagné à durer un peu moins longtemps, c'est à la fin un poil répétitif. Mais le procès public et scénarisé finit par se dessiner... Et la force de la colère que ce dernier saura éveiller en nous sera totale tant la manipulation, le chantage, l'hypocrisie et la cruauté de ce genre de gouvernements totalitaires nous rappellent à quel point le pouvoir et l'humain ne font que trop rarement (jamais ?) bon ménage... Avec, dix ans plus tard, la stigmatisation d'une même "catégorie" de personnes...
Au final, L'Aveu m'a passionné du début à la fin malgré une petite longueur aux 3/4 donc... La réalisation de Costa-Gavras avec ses quelques ralentis et flash-back m'a paru plus juste, plus efficace que dans Z, malgré l'absence totale de musique qui finalement rend l'ensemble bien plus réaliste. Et certaines séquences fonctionnent vraiment très bien - je pense à l'histoire à dormir debout, à la "pendaison", ou encore à la sorte de "pantalonnade".
Un film politique passionnant.