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Il fallait un certain culot pour s'attaquer au remake de l'un des classiques les plus vénérés du cinéma d'horreur, ni plus ni moins que le Dawn of the Dead de George A. Romero ! Chef d'œuvre du cinéma de la fin des années 1970, film engagé dont la mise en scène et l'interprétation sont insurpassables, portant la paternité de son illustre metteur en scène, Dawn of the Dead garde encore aujourd'hui tout son impact et sa modernité. Intemporel comme toutes les grandes oeuvres, voilà bien un film qui n'avait nul besoin d'être refait.

Mais c'était sans compter sur l'actualité du début des années 2000, qui a remis le cinéma d'horreur au goût du jour. Comme dans les années 1970 où des films tels tentaient d'exorciser la violence de l'Amérique du Vietnam, il devenait nécessaire qu'une nouvelle génération de cinéastes brossent aujourd'hui le tableau de l'Amérique post-11 septembre. Outre cette fonction cathartique du cinéma d'horreur, il faut ajouter le flair des studios hollywoodiens, qui ont vu aussi la possibilité de mettre en place un projet au fort potentiel lucratif.

Restait à réunir des individus assez fous pour accepter de marcher sur les pas du père du cinéma de morts-vivants moderne ! Au scénario, ce sera James Gunn qui ne le finira jamais d’ailleurs car il quittera le projet pour écrire le scénario de Scooby-Doo 2 : Monsters Unleashed, chacun ses priorités. Il sera remplacé par Scott Frank et Michael Tolkin qui ne seront même pas crédités.

À la mise en scène, c’est Zack Snyder qui est choisi, lui qui était jusqu'alors réalisateur de spots publicitaires. Il fait ses premières armes au cinéma et il s’offrira un petit rôle non crédité dans son film en campant un soldat lors de la scène se déroulant à la Maison Blanche.

Dawn of the Dead, le remake, sort en 2004, soit vingt-six ans après l’original.

La philosophie des auteurs est très claire dès la séquence pré-générique qui ouvre le film : évacuation du discours de George A. Romero sur la société de consommation et de tout son commentaire sur les années 1970, pour mieux se recentrer sur l'action, le suspense et le gore. Et ça marche ! Conscient de ne pouvoir atteindre le niveau de frénésie et de folie de l'introduction du film original, située en huis clos sur un plateau de télévision, Zack Snyder utilise son confortable budget pour présenter ce que Romero n'avait pu tourner faute de moyens : des scènes apocalyptiques à grande échelle, dont chaque fan avait rêvé jusqu'alors. Le spectateur assiste ainsi à l'avènement des zombies et à la chute d'un monde qui sombre de manière irréversible dans le chaos et la sauvagerie. Tendue comme un arc, tétanisante et brutale, rythmée par la musique de Johnny Cash, cette entrée en matière nous plonge dans un état de choc.

La suite, dans le centre commercial, si elle n'atteint plus jamais l'état de grâce de ce démarrage tonitruant, reste d'un excellent niveau, et plutôt fidèle au pessimisme de l'oeuvre de George A. Romero. Bourré d'action, le film est également porté par une galerie de personnages particulièrement bien campés, au sein desquels se détachent ceux interprétés par Jake Weber et Michael Kelly, dans le rôle particulièrement jouissif de CJ. Ayant substantiellement réduit l'intrigue et le propos du film original, Zack Snyder maintient l'intérêt avec plusieurs scènes-choc qui satisferont les spectateurs friands d'émotions fortes. Hélas, le réalisateur pousse peut-être le bouchon un peu trop loin lorsqu'il nous gratifie d'un bébé zombie peu convaincant mais qui, heureusement, disparaît très vite. Peu importe car ce remake est traité tambour battant de manière sérieuse et ambitieuse, avec un indéniable talent visuel.

Si on parle rapidement du casting, il n’y a pas grand chose à dire si ce n’est qu’il y a une pléiade de personnages tous convaincant, mais aussi fonctionnel. On peut remarquer la présence plaisante de Scott H. Reiniger, Tom Savini ou Ken Foree qui apparaissaient déjà dans l'original de 1978, mais sous d'autres rôles.

Certains spectateurs, dont George A. Romero lui-même, se sont offusqués des libertés prises avec le film original, notamment concernant les zombies, ici très différents des habituels cadavres lents et grotesques vus dans les films précédents. Avec ce remake, nous avons affaire à des cannibales féroces et affamés. Franchement, l'outrage ne nous parait pas flagrant, d'autant que l'on a déjà vu des morts-vivants de ce style dans le cinéma italien. Surtout, le meilleur moyen de rendre hommage à la démarche irrévérencieuse et iconoclaste des auteurs de cinéma gore est certainement d'adopter une optique tout aussi irrespectueuse que la leur, et donc de prendre certaines libertés avec les références.

Et puis finalement George A. Romero est revenu sur ses dires, déclarant que le film était bien meilleur qu’il ne l’avait anticipé. D’ailleurs, Romero utilisera l’idée des bus transformés en engins blindés anti-zombies dans son propre Land of the Dead, sortie en 2005, et étant le quatrième épisode de sa saga des morts-vivants, ce que l'on peut voir comme un hommage ou une réhabilitation du remake par le réalisateur du film original.

C’est précisément au moment de l'apparition de Ken Foree, exceptionnel interprète de Peter dans le film de Romero, ici dans le rôle d'un évangéliste, que le spectateur risque de comprendre le réel message du film. On a compris que Zack Snyder n'entendait pas reprendre à son compte le propos anticapitaliste, voire anarchiste, de son modèle. En revanche, certains passages du film, et surtout le discours de Ken Foree dans la version longue, nous donne la clef sur les intentions du réalisateur et de son scénariste. Que l'avènement des morts-vivants puisse être une métaphore de l'actualité du début des années 2000 aux États-Unis, c'est une évidence qu'il n'était nul besoin de souligner. Mais certaines images insistent sur ce propos. L'image de musulmans priant au début du générique frénétique et apocalyptique avait déjà éveillé les esprits, mais que penser de l’évangéliste expliquant que l'humanité fait l'objet d'un jugement divin pour s'être adonnés à l'homosexualité et à l'avortement ?…

À chacun son interprétation.

Au final, ce remake de Dawn of the Dead, pour ceux qui sont prêts à en accepter le principe et à excuser certaines légèretés dans le propos, constitue une excellente surprise, et l'un des grands moments du cinéma d'horreur américain du début des années 2000.

StevenBen
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le 9 avr. 2024

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Steven Benard

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