"Killers of the flower moon" est sans doute dans ces dernières années le projet cinématographique le plus fascinant et probablement le plus ambitieux. La mise (enfin) en image des crimes odieux perpétrés contre la communauté Osage dans une fresque de plus de trois heures, à l'ancienne, l'implication d'acteurs ou même d'artisans de la tribu pour la fabrication d'accessoires, un casting séduisant et évidemment, à la baguette un (le?) maitre du cinéma contemporain: Martin Scorsese. Marty pour les intimes étaient autant de promesses d'une grande œuvre à venir.
Mais parfois, des grandes espérances naissent de petites déception, d'importantes incompréhensions, et même (oui) une rage contenue, de celle qui fait serrer les dents, saillir la mâchoire inférieure et donne aux visages des airs mi-agressif mi-imbécile, mais qui probablement séduisent certains acteurs en quête de composition marquante. C'est ainsi que se dévoile DiCaprio, (Ernest Burkhart) https://urlz.fr/qnTL, vétéran de retour de la guerre, face à son modèle De Niro (son oncle William Hale), https://urlz.fr/qnTQ dans un parfait mimétisme et une confrontation de prognathes, cabotinant trois heures durant à qui mieux, le plus grimaçant des deux étant sans conteste DiCaprio.
Evidemment, les personnages en ce qu'ils représentent sont antipathiques par nature, Ernest Burkhart est une âme simple, cupide et violente manipulé par un William Hale, rancher richissime, calculateur toujours plus avide, cornaquant son neveu pour qu'il séduise et épouse une riche Osage, commanditaire des actes qui contribueront à décimer la famille de cette dernière pour partager le butin avec son descendant indirecte.
Adapté d'une enquête littéraire de David Grann, "la note américaine", Kilers of... prend, nous le comprenons rapidement, le parti comme souvent chez Scorsese d'adopter le point de vue des crapules, délaissant quelque peu le développement des personnages amérindiens. Les Osage donc déplacés par le gouvernement fédéral dans l'Oklahoma, avec lequel ils ont conclu en 1906, un accord octroyant de façon exclusive aux membres de la tribu des droits sur toute ressource minérale trouvée dans le sol. Les gisements de pétrole découverts enrichiront la tribu et susciteront la convoitise des "pionniers " blancs qui chercheront à épouser les natives fortunées.
Le livre, fruit d'un long travail de recherche historique adopte par nécessité le point de vue de l'enquêteur principal du "Bureau of Investigation" (l'inévitable Jesse Plemons), nouvellement créé à l'initiative D'Edgar Hoover et chargé d'enquêter sur les morts mystérieuses des membres de la tribu (une soixantaine en tout en 4 ans), idée initialement envisagée par le réalisateur , puis rejetée à l'initiative de DiCaprio qui devait à l'origine interpréter le personnage.
le Métrage nous entraine donc sur le terrain de jeu favori du cinéaste, une immersion au cœur du crime organisé, suivant l'ascension de petits malfrats à l'intellect limité qui se forgent une notoriété à coup d'assassinats (ah la balle tirée par derrière à bout portant dans la tête), des protecteurs un peu plus malins et faussement bienveillants, puis,
la chute, conséquence de la négligence des plus idiots encore qui laisseront l'empreinte de leur bêtise sur tous les lieux de crime, agissant à visage découvert et provoquant la chute d'une organisation criminelle désunie. Chacun "balançant" son voisin en espérant s'en tirer à bon compte.
Bref du connu du convenu, décevant parce que nous étions en droit d'attendre un meilleur traitement dramatique de cette adaptation qui pourtant portait en elle de belles promesses. La mise en scène est soignée, brillante même parfois (la séquence finale est tout à fait originale, le personnage de Molly (Lily Gladstone) est attachant, Ernest son mari est un personnage complexe, un peu insaisissable, amoureux probablement de sa femme, mais le fait que le cinéaste place le spectateur en position de mieux comprendre les enjeux et manipulation que lui est un peu déroutant.