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Jeunesse (Le Printemps)
7.4
Jeunesse (Le Printemps)

Documentaire de Wáng Bīng (2023)

Le travail, c'est un cancer. Le film ne cesse de le montrer. Il ne cesse de nous le rappeler à chacun de ses plans.


Wáng Bīng est un réalisateur certainement assez difficile à regarder. Car tout y est cru. La pomme de terre n'a même pas été cuite que nous l'avons déjà dans la bouche. Un goût de saleté, ce sont les dépôts de terre qui se mélange à notre salive.


C'est ça le goût qu'a dans la bouche un homme des bas-fonds. Un goût amer. On peut travailler pour l'argent et être pauvre. On peut naître pour vivre et ne pas avoir cette chance. Ces hommes sont les esclaves de cet argent qui n'est qu'une fiction humaine. Une fiction si primordiale dans nos non-vies.


On voit les travailleurs dans ce film répéter toujours la même rengaine à des patrons qui répondent par la leur. Les ouvriers demandent plus, comme un chantage pendulaire qui se tait le temps de se "reposer" et qui se ravive à nouveau lorsque l'on vient à peine de poser la joue sur l'enveloppe de plume d'oie durement arraché. Et les voilà se remettant aussitôt à plumer les volailles dont-ils ne verront que très partiellement les denrées.


C'est un brouhaha permanent. On entend les machines à coudre, le bruit de la ville, celui des néons, du tiroir électrique ; sans cesse.


Il faudra arriver à un peu plus des trois heures pour quitter ce monde que des gamins font vivre quotidiennement, et les voir respirer un air de campagne. Un air pauvre d'argent, mais reposant. On est absorbé par son calme.


Pourquoi faut-il regarder cent quatre-vingts minutes d'un quotidien pareil pour savoir admirer ce qui ne porte aucunement du miracle ? Pourquoi faut-il prendre les vessies pour des lanternes et les lanternes pour des vessies ? Pourquoi est-il si aisé de poursuivre cette direction de bon cœur quand il est tout de même évident que toute cette mascarade n'est rien d'autre qu'une mascarade, et qu'elle ne peut être appelé autrement ?


Nous mentons à notre cœur qui nous excuse de faire ce peu qui est de croire en ce que les autres nous disent.


En parlant à leurs cœurs, ils ne voient pas que derrière le leur, il n'y a pas de miroir, mais l'oreille des autres. Si ce n'était qu'un miroir, ce serait bien plus simple pour les pauvres gens de briser cette projection des désirs futiles. Mais malheureusement, nous sommes nombreux, et "malheureusement" parce que nous ne savons pas faire autrement que d'entendre de bonne foi ce que l'on vient nous conter. Ainsi, nous avons recueilli ce qui n'était peut-être pas vrai, cependant, qui est bien présent dans nos mémoires ; mémoires trop nombreuses pour que nous en mesurons l'échelle à qui les possède.


Il ne s’agit plus de croire ou de ne pas croire, mais d'en discuter ou de ne pas en discuter.


Jeunesse vient exhiber ce qui ne demande plus à être dit depuis longtemps, et qui demande à être montré. Montré au sens dur, premier de l'idée.


Ce n'est pas une révolution. Il n'y en a jamais eu. Jamais comme nous les imaginons. Les idoles doivent mourir, celle-ci y comprit.

Propppane
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le 8 janv. 2024

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