Into the Abyss
7.5
Into the Abyss

Documentaire de Werner Herzog (2011)

Euh... Ok... Franchement je ne m'attendais pas à ça. Je pensais voir un film certes fort sur les condamnés à mort, mais je ne pensais pas avoir un portrait de l'Amérique, la belle, la grande, étalée pendant presque deux heures au travers du prisme d'un fait divers particulièrement sordide.


C'est une sacrée claque, parce que dès le début, dès le témoignage de pasteur ça fait froid dans le dos, ces types enterrés dans un cimetière, avec des tombes anonymes, juste des numéros... et ce type qui reste avec eux jusqu'aux derniers instants... Faut avoir le coeur bien accroché pour supporter ça. Puis seconde claque on rencontre le condamné à mort, souriant, il a l'air d'être un gamin... on apprend que son père est mort il y a quelques jours et que lui va mourir dans huit jours... C'est à ce moment que j'ai compris que je ne comprendrai pas pas ce type, je ne peux pas comprendre un type qui sait précisément quand il va mourir et comment, ce qui est le cas pour aucun être qui n'est pas condamné à mort. Même un type en phase terminale, même s'il n'a plus d'espoirs de guérison ne sait pas exactement, quel jour, quelle heure il va mourir. Lui il sait, il sourit... il tente de ne pas penser à ces murs... Glaçant.


Le film va proposer différents points de vues, les tueurs, les familles des victimes, le père d'un des tueur, la femme d'un des tueur, un ancien gardien de prison et bien sûr les deux condamnés, l'un à perpétuité, l'autre condamné à mort. Et chaque témoignage est puissant, d'une grande force émotionnelle, parce qu'il est vrai, on a de longs échanges avec uniquement quelques rares coupes, on entend la plupart du temps Herzog poser les questions (permettant de faire la part des choses entre ce qui est spontané et ce qui est induit par Herzog) et de repérer les choses que se demande Herzog, tout ce qui concerne le tactile, le toucher, un père menotté avec son fils... le père qui peut sentir la main de son fils...


Je trouve ça vraiment fort et émouvant. D'autant que durant les témoignages Herzog arrive à créer de l'empathie pour ces personnes en les laissant parler, en allant petit à petit vers le gros plan...


Mais ce film m'a vraiment mis mal à l'aise, car tous ces gens sont perdus, ils sont perdus depuis le départ... des gens victimes de leur milieu social, de l'imbécilité de leurs parents... Mais tous... même chez les victimes, les familles des victimes, eux-aussi vont en prison, meurent dans des accidents idiots... Comme si quelque part la sélection naturelle faisait son travail. Une femme dit à un moment donné que certaines personnes ne méritent pas de vivre, sans c'est doute le cas...


Et pourtant tout comme Herzog je pense que ce n'est pas à nous de décider quand est-ce-que son prochain va être tué. J'ai été assez touché lorsqu'il mentionne Jésus par opposition à l'ancien testament et à la colère divine pour justement plaider contre la peine de mort.


Parce que si le film donne la parole à tout le monde, c'est avant tout un film contre la peine de mort et il en est un car non seulement Herzog dit ce qu'il croit, mais rien que le fait de donner la parole à un condamné à mort quelques jours avant son exécution, montrer un tapuscrit de ses dernières paroles... quelque chose d'aussi fort résumé aussi froidement... ça marque...


Et ensuite c'est la femme, la soeur d'une des victimes qui passe pour un monstre même si elle ne le veut pas. Elle qui se sent soulagée de la mort d'autrui, qui a refusé de pardonner, de passer à autre chose, de vivre.


Je trouve le documentaire vraiment brillant, car il montre que rien n'est jamais simple et que surtout il y a un profond problème aux USA... et pour la première fois de ma vie j'ai compris pourquoi on interdit de boire avant 21 ans là-bas... L'alcool, la drogue, les armes, la pauvreté, l'indigence intellectuelle... la bêtise... ça fait très mauvais ménage...


Et en sortant de ce film je suis embêté car leur mode de vie me répugne au plus haut point... et pourtant Herzog arrive à les humaniser ces baltringues ricaines... rendant triste leur mort...


Mais lorsqu'on est dans les couloirs de la mort, est-ce-que l'on attend son exécution, on la redoute ou est-ce-qu'on profite du temps qui nous est imparti ?

Moizi
9
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le 8 déc. 2015

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Moizi

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