Inferno
6.8
Inferno

Film de Dario Argento (1980)

Mater Tenebraum ou la visite des enfers.

Difficile de regarder Inferno sans songer à Suspiria et par conséquent à chercher à les comparer. Si l'on devait faire cela, Suspiria est infiniment plus osé, par ses couleurs, sa mise en scène toujours portant à la confusion pour rendre ce sentiment de malaise, et plus pointu musicalement également. Mais Suspiria se déroule comme un thriller pendant une bonne partie du film, avant de dériver doucement vers le fantastique. Inferno lui part directement dans le fantastique pour basculer plus tard sur quelque chose de plus proche du thriller horrifique. S'il est moins osé, moins original et sans aucun doute moins bon que Suspiria, Inferno est tout de même un chef d'oeuvre, un conte de fée merveilleux basculant dans l'horreur primale et animale où la survie compte infiniment plus qu'à chercher une explication.

Le film commence en suivant Rose, une jeune femme qui apprenant que l'immeuble qu'elle habite aurait été construit pour l'une des trois divinités maléfiques régnant sur le monde. Troublée par ce savoir, elle se met en quête de l'une des trois clés reposant dans la cave. Plongeant dans une cavité innondée, elle tombe alors sur une espèce de refuge de la mater Tenebrarum. C'est sans doute la séquence la plus belle et la plus effrayante du film, car peu à peu on sent le malaise venir sans parvenir à déterminer d'où avant qu'on ne découvre que l'endroit est parsemé de cadavre en décomposition. On bascule ensuite à Rome où le frère de Rose étudiant la musique se laisse envoûté par la troisième mère, Mater Lacrimarum, la plus belle des trois mères, oubliant ainsi de lire la lettre de sa soeur. Que son amie récupère, scellant ainsi son destin. Voici donc les trois personnages principaux que nous allons suivre, Rose qui est passionnée par les secrets et les mystères cherchera à pénétrer celui de son immeuble, l'amie de son frère qui récupère la lettre, signant ainsi son arrêt de mort sans le savoir, et enfin Marc le frère de Rose qui en tentant de retrouver sa soeur va être au coeur même des très étranges et mortels évènements qui vont secoués l'immeuble New Yorkais.

Se déroulant tel un conte macabre, Inferno navigue entre l'étrange, Dario Argento utilisant à la perfection son décor d'un immeuble baroque en plein New York, les couleurs et les lumières constituant un chemin parchemé d'embûche mais également des espèces de phares attirant les personnages dans des pièges mortels, le fantastique où le spectateur baigne dès le début avec cette voix off grave rappelant le père qui raconte une histoire à son enfant, mais aussi l'esprit de Lovecraft avec ces témoignages de l'au-delà, et le thriller horrifique avec des morts plus sadiques les unes que les autres: les coups de couteau dans le dos de l'étudiante, la vitre servant de guillotine, les chats dévorant la chair humaine, et détournant l'attention pour permettre au tueur d'agir, et les rats qui couvre le corps de leur victime. La séquence où l'antiquaire estropié tombe dans l'eau, sauvagement attaqué par les rats appelle à l'aide est sans doute l'une des morts les plus malsaine car à ce moment, un vendeur de hot dog répond à son appel, et semble venir l'aider, mais le tue froidement, avec un acharnement malsain, pour laisser son cadavre aux rats. Une des morts les plus surprenantes puisqu'on ne s'attends absolument pas à cela. Et ainsi si l'on s'attend à certaines morts, d'autres nous surprenne, et toutes finissent par se juxtaposés, s'enchevêtrées, tel une toile d'araignée mortelle et fatale où les personnages s'accrochent sans le savoir.

La magie semble régner dans ce film, et c'est ce qu'on pense pendant une bonne partie du film, avant de réaliser qu'il ne s'agit ni plus ni moins de cette bonne vieille ennemie: la mort. Mater Tenebrarum est tout simplement la mort qui vient frapper tous ceux qui la cherche ou la redoute, tous ceux qui cherchent à percer le mystère de son existence. Rien ne peut triompher de la mort excepté un instinct puissant de survie. Et c'est ainsi que le conte horrifique finir sur une morale disant qu'on ne peut échapper à la mort, qu'on ne peut la vaincre, on peut seulement tenter de ne plus la craindre. Comme Mark qui finit par lui tourner le dos.
Sophia
9
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le 1 févr. 2011

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Sophia

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