Il est parfois désagréable de regarder un film ou il est possible de prédire à l’avance pour chaque plan celui qui le suivra (la mort de la vioque, la braguette du dealer…) ; ça en devient parfaitement pitoyable lorsque le même effet touche les dialogues. Avec Impardonnables, il suffit de se demander quelle pourrait être la prochaine réplique la plus ridicule et Bingo vous gagnez : « Il faut que je te dise, j’ai couché avec le gosse » ; « Je ne sais pas, je ne sais plus »…

Le film enchaine des arcs narratifs et essaie de les combiner en essayant de tout dramatiser mais malheureusement, Téchiné a oublié qu’on en a rien à faire de ses histoires : Osef de la fille disparue, Osef du dealer dans son palais, Osef de l’agence immobilière, Osef du vieux qui peut plus écrire et qui bande mou…

Même pas un film Bobo, juste un film bourgeois et ringard.

Entre deux dialogues pourraves sur le sexe homo ou sur la différence d’âge du niveau de la rubrique sexo Marie Claire (« Tu ne penses pas que la différence d’âge c’est important » ?) Téchiné se sent obligé de bouger un peu sa caméra pour faire genre du cinéma quoi. Alors il nous pond des plans clins d’œil au «Mépris » avec sa statue sans fourche au fond du jardin (Hé ! Pas de fourche ! Vieil écrivain qui n’arrive plus à écrire ni à tenir sa meuf ! Du sens ! Du sens !).

Téchiné est libre et il aime les personnages qui s’affranchissent des normes avec la moyen vieille qui fait jouir la méga vieille, puis son fils, puis le vieillissant ; la fille qui est mariée mais peut « vivre sa vie » de son côté... Sous prétexte de vouloir filmer la liberté de ses personnages et de sa mise en scène avec une écriture rapide, brouillonne et une narration à la limite du vraisemblable pour un film à la fois trop rapide et ennuyeux ; Téchiné livre malheureusement un brouet relevant plus des dernières œuvres de Robe Grillé (soit le total inverse de la liberté justement) que d’un De Oliveira, Resnais ou autre.

Non seulement c’est inintéressant au possible mais en plus, lorsque le cinéaste, à force de se débattre avec son film impuissant, s’énerve un peu ça donne des images ridicules :

- Mélanie Thierry qui fait de la sexcam pour son père (avec juste les pieds dans le champ ! Whouahou !).
- le jeune homme attardé mental (en fait c’est juste un gamin de 20 ans renfermé mais il est dirigé comme un gogol) qui jette un type à l’eau façon sketch Canal + (pour réussir un effet comme ça, il faut s’appeler Eugène Green ou Guy Maddin peut-être) car il est pris d'une petite crise d'homophobie passagère.
- Dussolier qui tombe à l’eau (en fait un saut de grenouille pour singer une chute accidentelle)
- Dussolier qui pète la gueule à un gamin façon Air mohammed Ali en plein cimetierre de San Michele…

Mal fichu, mal dirigé, découpage foireux (tous les raccords blessures ou saignement de nez sont dignes de « Plus Belle la Vie », que ce soit d’un point de vue artistique ou technique), le film est un ratage total.

Lorsque l’on a Dussolier sur le plateau, faire preuve de liberté et d’audace, ce n’est pas de lui faire faire les cascades de Belmondo avec les moyens d’une télenovela nigérienne. Nicolas Boukhrief avait fait tout l’inverse de Téchiné avec son très bon « Cortex » où le simple fait d’enjamber un muret pour Dussolier devenait une source de suspens et un enjeu narratif puissant.

Définitivement, Téchiné, n’est pas (ou plus ?) un cinéaste, juste un retraité sous la perfusion du CNC tapinant sur l’autel d’une cinéphilie bourgeoise dont les deux pieds sont déjà dans la tombe.


Pour être tout à fait honnête ; ça fait quand même un peu plaisir de voir Venise et deux ou trois plans sont à sauver lors de la filature de Carole Bouquet : lorsqu’elle est filmée de face, le bateau du gamin à l’arrière plan, le choix de la focale est particulièrement adapté, offrant un rapport entre l’avant et l’arrière plan très « magnétique » et laissant une profondeur de champs floue juste ce qu’il faut, un choix à la Shyamalan du plus bel effet.

On peut aussi faire crédit pour un raccord en fondu au blanc dans les premières minutes (figure risquée et ici réussie ; ça c'en est de l'audace pour le coup) ainsi que quelques plans de coupe bien éclairés sur Dussolier tout seul dans son jardin (en mode un peu Terrence Malick).
Dlra_Haou
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le 20 août 2012

Modifiée

le 20 août 2012

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Martin ROMERIO

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