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Si Hype devait être imagé, "Ils ont cloné Tyrone" serait la première de couverture à coller à ce terme de plus en plus déplaisant. À cependant noter que celle-ci ne s'est pour une fois pas tant trompée que ça. Cela reste une remarque, mais je trouve pertinent de partager les mauvaises langues disant que, bizarrement, les théories du complot populaires dont, celle du film, ne sont jamais très glamour et traitées de manière intelligible par la culture et les médias ; la faute à leur audience américaine pro Trump notamment ; mais que ramener par la population noire, le sujet devient subitement artistique et riche de réflexion, pour le public comme les médias et journalistes qui en parlent. L'idée reste tuchy, mais dans notre contexte actuel, et comme nous allons le voir plus bas, le sujet du film reste convenu dans le fond et sa manière de le dire, mais parvient à se hisser des autres par sa production. Une fois encore de ce fait, c'est la forme qui primera sur le fond, et le scénario emprunte à un historique pourtant d'habitude balayé ou refusé.

Le film m'a laissé énormément sur ma faim à raison par exemple de sa fin très vite expédiée et trop explicative. Tentant de passer un message en lien avec la communauté noire, notre réal ici n'a pas commis l'erreur de faire un film lourdingue comme les derniers Spike Lee, mais n'a pas non plus opté pour la subtilité d'un Michael Roemer dans Nothing but a Man. On est ici dans la lutte tiède, la révolte mi-dure voire pas assumée. En fait, à la manière d'un Peele, il a tenté ici de faire un film à thème nous décrivant une réalité de manière abstraite. Mais, n'y parvenant pas, l'histoire prend soudain un revirement total pour passer d'une enquête dans un quartier noir américain (avec tout ce que cela comprend) à un film 100 % accrédité par Netflix très blingbling tape à l'œil et surtout passe-partout pour rameuter le plus de monde. On est à ce stade presque dans un film contestataire, mais cette fracture dans les discours, les mises en avant du sujet, et surtout le scénario en fait un film alarmiste. À la fin du film, on est à 2 doigts de penser que l'état expérimente actuellement pour faire disparaître les noirs d'Amérique, alors même que c'est bien le camp Démocrate et toutes les politiques sociales qui sot au pouvoir pour aller dans le sens inverse de cette tendance. Petite anecdote d'ailleurs, il est arrivé dans les années 80 une situation type où un quartier américain avait été privé d'un vaccin contre le SIDA afin d'en étudier les effets ; c'était d'ailleurs si ciblé vers la population noire que même les affiches et tractes avaient été pensées à l'époque pour toucher les personnes noires ! Le scénario ne sort donc pas du cul, mais la mise en scène, le format intemporel et le style de discours pose question du fondement même de la pensée du sujet. Voit-on ici la réalité d'un homme noir en Amérique ? Est-ce que les cibles du sujet étaient les autorités, ou les noirs qui trahissent leur couleur, ou les blancs racistes de manière générale ? Un peu tout et surtout un peu rien. Ici se retrouvera, d'une manière ou d'une autre, les violences policières, le racisme, la pauvreté des minorités, les quartiers, les gangs, les armes, no futur ...

Quant à la question de l'effondrement de la Black Culture, liée fortement aux bouleversements de la société et la mutation de la mondialisation, le film tente à sa manière de dépeindre les récents excès de certains confrères aillant troqués des combats et leur peuple au profit de la gloire et du showbiz. C'est le point central du film, se résumant à une sorte de grand remplacement volontaire, cherchant désespérément à ne plus vivre dans la douleur au point d'en regnier son propre être. Quel beau sujet qui aurait pu être une superbe fin pour le héro au travers d'une catharsis dans la destruction du méchant pas si méchant finalement. Malheureusement, là aussi, une bouteille est lancée à la mer, mais se casse contre une vague de facilité scénaristique transcrite en 5 minutes chrono dans le rush final.

Le film nous présente d'ailleurs un scénario prenant, avec une multitude d'indices et d'époques, ce qui aurait pu être senti comme une bonne expérience si seulement le spectateur ne se retrouvait pas dans une situation de vécu impersonnel et déconcertant. À la fin, on peine à savoir si le film passait un message sur les gens d'avant, de maintenant ou pour les générations à venir. Ne sachant donc pas qui cibler ni à qui parler, on retrouve face au plus général des tableaux de genre retrouvable chez les pairs du genre.

Quant à l'esthétique, elle emprunte là aussi beaucoup à ses paires du genre. On reconnaît ici Spike Lee ou Jordan Peele ; des œuvres comme snatch ou du Tarantino à plusieurs niveaux ; tout se mélange et si le tout forme un ensemble plutôt positif, on constate bien cependant que l'on a à faire à un premier film. Science-fiction, film d'anticipation, film social, comédie, film d'action... Autant de tagg et de descriptifs montrant bien à quel point beaucoup, et peu être trop d'idées, ont été apportées à l'œuvre. Dans la construction même, on oscille entre film grand public et passage au cinéma d'auteur. Bel effort de mise en scène et de colo, mais dialogue et scripts clichés et racoleurs.

Pour un film que certains déclarent déjà comme le film de l'année, je suis assez stupéfait du pouvoir que peut produire l'effet de masse. On peut reconnaître une qualité certaine au film sans nul doute, mais il paraît censé de rester sur terre et de relever les laborieux efforts déployés pour tenir le tout fonctionnel. Le script ne tient qu'à un fil de l'explosion à partir du moment où on connaît les clones ; la blacksploitation est censée être le cœur du sujet, mais ne tient que 10 minutes de film en admettant que les quelques dialogues et remarques balancées en l'air en fasse partie. Vous allez me dire qu'elle est le sujet même des motivations du méchant, mais remplacés les par tout autre choses et vous verrez que finalement, rien ne lie de but en blanc les motivations et l'action. Et que dire des personnages déjà idolâtrés pourtant si peu percutants. Si Fontaine fait le taf et se créer cette identité vue et revue, mais efficace de banlieusards dark, les autres sont très peu appréciables. Le trait de caractère principal de la fille prostituée est qu'elle en est une et donc qu'elle est en permanence dans ce mindset, comme si son comportement au travail était le même à l'extérieur. On a donc le droit aux cris, gesticulations vulgaires et outres blagues sur son taf sexuel. Notre Mac quant à lui est censé être le blagueur, celui qui nous rapporte le tagg humour/comédie ; il ne sera jamais vraiment drôle tout juste bon à tirer un rictus dans un contexte particulier. On est donc dans une enquête de science-fiction à la scooby doo tand les enjeux du film sont immenses à par rapport à la forme que cela prend. C'est par exemple réellement l'état américain qui fait des expériences aussi graves dans une base secrète et vous allez me dire que dans ce contexte aussi compromettant pas un seul garde, soldat ou moyen de défense n'est présent pour défendre une telle base si ce n'est un ascenseur. Dans un film se passant dans le passé, présent et futur, où l'humain est capable de cloner à l'identique un autre être avec la transmission des souvenirs et acquit passés, vous allez me dire qu'ils sont incapables de savoir si un homme est vraiment mort ou non quand il rentre dans la base ?? Ce n'est donc pas désagréable, mais à la différence des épisodes de Scooby-doo, on a le droit à la version très longue, sans blague, sans légèreté et avec, en prime, le goût de l'inachevé et de la lourdeur d'un discours absolument pas pensé pour un tel objectif cinématographique.

21rems10
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le 16 août 2023

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